« Nous avons une petite embrouille avec la Chine » a tweeté Donald Trump. Bel euphémisme : il y a près d'un an que le président américain a lancé la guerre commerciale contre l’Empire du Milieu. C’est conforme à sa promesse électorale d’empêcher la Chine de détruire l’emploi industriel aux États-Unis et de défier leur supériorité technologique.

Après l’échec de pourparlers entre Washington et Pékin, début mai, la dernière offensive américaine est particulièrement agressive : Washington a placé le géant chinois des télécoms Huawei (numéro deux mondial des smartphones et leader planétaire de la 5G) sur une liste d'entreprises auxquelles il est interdit de vendre des équipements technologiques. Or Huawei dépend des puces électroniques de fabrication américaine pour équiper ses téléphones portables : sa survie est menacée. En outre, le président américain a ordonné de surtaxer à hauteur de 25% toute une palette de produits chinois, et a déclenché une procédure pour imposer des droits de douane supplémentaires à la totalité des importations chinoises, soit quelque 530 milliards de dollars de produits par an.

Cette fois, Pékin ne se contente plus de rire jaune. Tandis que Huawei attaque sur le terrain judiciaire une décision « tyrannique », le gouvernement chinois annonce la constitution d’une liste noire d'entreprises étrangères « non fiables » en plus de l’entrée en vigueur, ce 1er juin, de nouveaux droits de douane punitifs en Chine sur des produits américains, avec une batterie de surtaxes à 10%, 20%, voire jusqu'à 25% sur un ensemble de marchandises américaines déjà taxées, représentant 60 milliards de dollars d'importations annuelles. 5.410 produits américains sont concernés. Mais la Chine surtaxant déjà la quasi-totalité des produits américains qu’elle importe, ce n’est sans doute pas cette menace-là qui fera reculer Donald Trump.

Le joker dont dispose Pékin dans son bras de fer avec Washington, ce sont les « terres rares ». Il s’agit d’un ensemble de 17 minerais indispensables à de nombreuses industries de pointe (smartphones, écrans plasma, véhicules électriques, armement) dont la Chine détient 71% de la production mondiale (120.000 tonnes l’an dernier, les autres gros producteurs étant l’Australie -20.000 tonnes- et les États-Unis -15.000 tonnes). Pékin a laissé entendre cette semaine qu'il pourrait réduire ses exportations. « En lançant une guerre commerciale contre la Chine, les Etats-Unis courent le risque de perdre un approvisionnement en matériaux vitaux pour leur puissance technologique », a menacé l'agence officielle Chine nouvelle. « Nous sommes contre la guerre commerciale, mais nous n’en avons pas peur », a lancé le vice-ministre chinois des Affaires étrangères, le 30 mai, en conclusion d’une conférence de presse où il avait dénoncé « du terrorisme économique, du chauvinisme économique et du harcèlement économique à l’état pur ».

Mais ayant montré ses muscles, Trump, impavide, mise sur la signature d’un accord avec la Chine fin juin, après sa rencontre avec Xi Jinping lors du sommet du G20 d’Osaka. Il juge l’économie américaine assez forte pour encaisser l’hypothétique mise en œuvre des mesures de rétorsion brandies par Pékin. Quant aux « terres rares », les Américains en furent longtemps les premiers producteurs mondiaux et auraient la capacité de relancer cette industrie sur leur sol : signe précurseur, le groupe américain Blue Line Corporation et le minier australien Lynas viennent d’annoncer la construction d’une usine de raffinerie de terres rares à Hondo, au Texas.