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USAID, la mise à nu d'une agence sous influence

Par Judikael Hirel. Synthèse n°2404, Publiée le 20/02/2025 - Photo : Financée par le contribuable américain, l'USAID a subventionné des programmes plus que surprenants partout à travers le monde. Crédits : Shutterstock
Suivez l'argent… Outre-Atlantique, Elon Musk semble s'être attaqué aux nouvelles écuries d'Augias. S'attendait-il à cela en plongeant dans les arcanes des finances publiques américaines avec son DOGE (Department Of Government Efficiency) en mission à durée déterminée ? Sans doute pas. USAID, l'Agence des États-Unis pour le développement international, s'est rapidement retrouvée en première ligne des investigations de ses équipes...

Qu'est-ce que l'USAID ? Avant tout une relique de la guerre froide, créée en 1961 par Kennedy afin de contrer l'influence soviétique qui se répandait à travers le monde. Mais en six décennies d'existence, cette arme dite de « soft power » s'est métamorphosée en une technostructure gigantesque comptant 10 000 employés pour un budget de 44 milliards de dollars en 2024. « USAID n'est rien d'autre qu'une caisse noire corrompue pour les démocrates de gauche. Ça suffit ! », a tweeté le 47e président des États-Unis. 

Elon Musk a pour sa part qualifié l'agence d'« organisation criminelle ». Les premières investigations ont déjà révélé l'ampleur des financements surprenants : 200 millions de dollars ont été versés afin de soutenir des projets dans la bande de Gaza avant le pogrom du 7 octobre 2023. Fallait-il par exemple financer la « Palestinian Medical Relief Society », dont le président a salué les massacres d'Israéliens comme « un jour de gloire pour la résistance et le peuple palestiniens » ? Et que penser des 854 384 dollars donnés pour financer… un centre de recherches à Wuhan entre 2014 et 2021, travaillant sur les gains de fonction d'un coronavirus testé sur des chauves-souris ? Mi-février, le président républicain de la commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants, Brian Mast, dressait une liste éloquente de financements problématiques ou idéologiques de l'USAID. « J'en ai des pages, ce n'est pas de la diplomatie, ces programmes doivent cesser », soulignait-il. « La plupart des gens et des programmes de l'USAID ont littéralement trahi l'Amérique. L'administration Biden a dépensé cet argent pour imposer son idéologie d'extrême gauche aux autres nations. » Le représentant liste ainsi 2 millions de dollars pour des cliniques de changement de sexe au Guatemala, 520 millions versés à des consultants afin de parler du changement climatique à la population africaine, 5,5 millions pour la cause LGBT en Ouganda, 14 autres millions afin d'identifier des leaders LGBT au Cambodge, ou bien 425 000 dollars pour sensibiliser les producteurs de café indonésien aux questions de genre… Mais aussi 20 600 dollars pour un spectacle de drag queens en Équateur, 47 020 dollars pour une œuvre de théâtre transgenre en Colombie, et même 3,3 millions de dollars versés pour une initiative « être LGBTQ dans les Caraïbes »… Dans un rapport écrit pour le think tank conservateur américain Heritage Foundation, Max Promirac, ancien haut responsable de l'agence, témoignait de ce glissement idéologique sous les administrations démocrates successives, entamé sous le mandat de Bill Clinton, poursuivi sous l'administration Obama, et accéléré avec Joe Biden à la Maison-Blanche.

La question du financement direct ou indirect de nombreux médias, notamment américains, met aussi en lumière la construction d'une opinion publique via l'unanimisme médiatique. Ainsi, elle représentait à elle seule 8 % du budget du BBC Media Action, « organisme caritatif destiné à verser des aides au développement d'une presse libre à l'étranger ». Au total, selon les chiffres dévoilés par l'agence elle-même par le passé, ce sont pas moins de 268 millions de dollars qui ont été versés directement ou indirectement à plus de 700 médias et 6 200 journalistes dans 30 pays différents. Selon Reporters sans frontières, neuf médias ukrainiens sur dix bénéficiaient de ces aides.

L'usine à gaz tentaculaire des financements de l'USAID est désormais placée sous le contrôle du secrétaire d'État Marco Rubio. « L'idée n'est pas de stopper ses programmes, a-t-il précisé. Certaines choses qu'elle accomplit sont bonnes, et d'autres posent fortement question. » Mais « le niveau d'insubordination rend impossible la conduite d'une sorte d'examen mûr et sérieux dont, je pense, l'aide étrangère au sens large devrait faire l'objet. » Faut-il également parler de corruption et de détournement de fonds ? Selon Wikileaks, « neuf dollars sur dix de l'USAID dépensés en 2022 sont allés à des entrepreneurs, principalement dans la région de Washington DC. Moins d'un sur dix est allé à des groupes en première ligne ». Une concentration des aides sur l'épicentre du pouvoir fédéral qui ne peut que poser question… « Il n'y a pas grand-chose d'« étranger » dans l'aide étrangère », constate ainsi l'institut d'étude indépendant Unlock Aid. « En 2017, 60 % de tous les financements de l'USAID étaient destinés à seulement 25 groupes. En 2022, selon Devex, dix entrepreneurs ont remporté plus de 50 % de chaque dollar contractuel versé par l'USAID.‍ »

Outre-Atlantique, l'émission de Joe Rogan sur le sujet a déjà été vue par plus de six millions de spectateurs sur YouTube, signe de l'intérêt pour le sujet (voir notre sélection ci-dessous). Pour autant, le duo Trump-Musk est peut-être allé trop vite en besogne en attaquant les financements d'USAID aussi abruptement ? En effet, il aura aussi besoin de cet outil de « soft power » pour lisser les effets de sa politique « America first ». Mais aussi pour des combats utiles, comme le financement de traitements contre le SIDA ou la malaria en Afrique, financés à hauteur de 1,9 milliards de dollars en 2023.

La sélection
Joe on the Crazy USAID Spending Being Uncovered
Regarder l'émission sur la chaîne YouTube de Joe Rogan
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