Le « babillage » du G7 victime du sommet Trump/Kim Jong-un
International

Le « babillage » du G7 victime du sommet Trump/Kim Jong-un

Par Philippe Oswald. Synthèse n°373, Publiée le 11/06/2018
Le sabordage du G7 (pour « Groupe des sept » : États-Unis, Canada, Royaume-Uni, France, Allemagne, Italie, Japon) par Donald Trump a mis groggy ses interlocuteurs. Ils avaient beau se méfier des coups de sang du président américain, ils ne s’attendaient pas à son revirement furibard à l’issue du G7, le dimanche 10 mai, dans l’avion qui l’emmenait du Québec à Singapour pour y rencontrer le dictateur nord-coréen Kim Jong-un.

C’est l’hôte de ce sommet du G7, le canadien Justin Trudeau, qui a servi de prétexte à ce nouveau coup d’éclat : quelques heures après l’accouchement aux forceps d’un document final en 28 points, sur la nécessité d'un « commerce libre, équitable et mutuellement bénéfique », Justin Trudeau a annoncé dans sa conférence de presse que le Canada prendrait des mesures de rétorsion contre l'instauration de droits de douane américains sur l'acier et l'aluminium en provenance du Canada, de l'Union européenne et du Mexique. « Trahison » d’un dirigeant « malhonnête et faible » selon Trump : « Le Premier ministre Trudeau du Canada s'est montré docile et modéré pendant nos réunions au G7, tout cela pour donner une conférence de presse après mon départ dans laquelle il déclare que 'les droits de douane américains sont presque insultants' et qu'il ne 'se laissera pas bousculer' », a tweeté Trump depuis Air Force One qui l’emmenait à Singapour. « Nos tarifs douaniers sont en réponse à ses droits de douane de 270% sur les produits laitiers! », a-t-il poursuivi, annonçant que son administration réfléchissait à l'instauration de nouvelles taxes à l'importation d’automobiles sur le marché américain.

Les principaux membres européens du G7, Allemagne, France, Royaume Uni, ont assuré le Canada de leur entier soutien, jusqu’à envisager de nouvelles rétorsions aux taxes américaines. En revanche, Vladimir Poutine s’est amusé du fiasco de ce « babillage» des sept, en se payant le luxe de les appeler à « une vraie coopération », alors que le président américain n’avait pas été entendu lorsqu’il avait plaidé pour un retour de la Russie dans le G7. Mais le principal motif de ce coup d’éclat a sans doute été révélé sur CNN par Larry Kudlow, le principal conseiller économique de Donald Trump : il a estimé que la réaction du président était destinée à ne pas « montrer de faiblesse » avant son sommet avec Kim Jong Un. En effet, Trump n’a jamais caché que sa rencontre à Singapour le mardi 12 juin avec le dirigeant nord-coréen revêtait bien plus d’importance à ses yeux que le sommet du G7. « C’est une occasion unique » qui « ne se représentera jamais » d’arriver à un accord nucléaire avec Pyongyang » a-t-il annoncé.

Interviewée sur Franceinfo, Laurence Nardon, responsable du programme Etats-Unis à l'Institut français des relations internationale, minimise la portée de ce coup de théâtre pour l’avenir du G7 : pour elle, Trump est avant tout un « pragmatique » qui applique à la politique les techniques de négociation exposée dans son livre The Art of the Deal. Selon elle, Trump « finira par céder » « s'il voit que les Européens et le Canada tiennent bon face à lui ». Mais rien ne dit qu’ils continueront à faire front alors que l’UE est plus que jamais divisée…
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