Diversité et inclusion en entreprise : quand les loups se déguisent en agneaux
Économie

Diversité et inclusion en entreprise : quand les loups se déguisent en agneaux

Par Ludovic Lavaucelle. Synthèse n°1534, Publiée le 15/03/2022
Après la glorification de l’argent dans les années 80, la « responsabilité sociale » des entreprises est devenue à la mode. Cette « Corporate social responsibility » – « CSR », l’acronyme anglais largement utilisé dans les multinationales – s’est transformée pendant la dernière décennie en « capitalisme woke ». La politisation des sociétés privées est mise en évidence par la publicité. Le géant des crèmes glacées Ben & Jerry’s a, par exemple, sorti des produits estampillés « anti-Trump » en 2019.

Les « premiers de cordée » du capitalisme mondial protestent de leur sincérité. Selon eux, la priorité du chef d’entreprise devrait être de promouvoir leur vision (parfois nébuleuse) du bien commun avant l’intérêt des actionnaires. Klaus Schwab, le Président du Forum Économique Mondial, comme Larry Fink, à la tête du géant financier BlackRock, exercent aujourd’hui une influence politique majeure sans être passés par les urnes… Fink utilise les dix mille milliards de dollars en avoirs financiers qu’il contrôle pour forcer les acteurs économiques à se conformer à sa vision de la « justice sociale ». Il lui suffit de conditionner son investissement à la mise au pas de sa proie. Les banques ne sont pas en reste. Goldman Sachs a annoncé l’année dernière qu’elle n’aiderait plus un client à s’introduire en bourse à moins qu’il ait atteint un objectif imposé de diversité au sein de son comité de direction… Ce progressisme militant s’est trouvé un acronyme : ESG (« Environment, Social, Governance »).

Ces cinq dernières années ont marqué un changement notable, explique William Malcolmson pour Quillette (voir son article en lien). D’abord synonyme de contrainte, l’estampille « ESG » est maintenant présentée comme un facteur de succès. Au cœur de ce changement d’approche, un nouveau terme inventé par des esprits décidément créatifs : le « dividende de la diversité ». C’est-à-dire le bénéfice financier généré par une main d’œuvre respectant des ratios prédéterminés de diversité raciale, sexuelle etc… Le « dividende de la diversité » est un concept qui s’est vite répandu sans avoir – pour autant – été confirmé par des études chiffrées et recoupées. Seules les firmes de conseil McKinsey et BCG ont sorti depuis 2015 plusieurs rapports censés démontrer sa valeur. Or ils sont fondés sur des données qui n’ont pas été rendues publiques.

Le « dividende de la diversité » semble bien bénéficier à un certain type d’entreprises : les multinationales assez riches pour s’offrir les services de McKinsey… « L’emprise réglementaire » consiste à imposer des obligations empêchant l’arrivée de nouveaux entrants dans un marché. Bref, cela favorise les puissantes multinationales. Il n’est pas étonnant que la mode de l’estampille « ESG » soit promue par les géants du capitalisme mondial : elle permet la formation d’oligopoles.

Le phénomène « d’emprise réglementaire » a été décrit par l’économiste Stigler dès les années 70 : les agences gouvernementales sont dominées par les intérêts qu’elles sont censées contrôler. Les stratégies des entreprises varient. Celle qui consiste à réclamer plus de règlementation est très efficace car elle joue sur la perception que les grandes entreprises n’y ont aucun intérêt. Or, la capacité des acteurs économiques à supporter l’imposition d’une charge dépend de leur taille. Les géants peuvent absorber un surcoût à court terme comme un investissement permettant d’écarter à long terme ses rivaux plus petits.

La promotion de la « diversité et de l’inclusion » est une arme puissante pour les grands prédateurs car elle utilise les médias pour toucher le grand public et, in fine, les instances réglementaires. Les nouvelles stratégies « intersectionnelles » de promotion et de recrutement sont des piliers de l’idéologie « ESG ». Bien sûr qu’une équipe faite de profils divers est bénéfique – surtout dans un contexte de marché international. Mais on n’embauche plus d’abord en fonction de l’expertise, on ne promeut plus en fonction du mérite seul. L’impact négatif sur la productivité se porte d’abord sur les acteurs les plus petits. Les géants sont privilégiés par les meilleurs candidats, encore plus auprès des « millenials », quand ils s’affichent parés des vertus cardinales du « wokisme ».

L’ESG conduit aussi à une croissance exponentielle du coût des Ressources Humaines. De 343 milliards de dollars en 2012, le « marché » des RH est passé à 476 milliards en 2019. La tendance ne va pas s’inverser avec la multiplication de nouveaux postes dont la mission est de promouvoir la « diversité » (+71% ces 5 dernières années). Une conférence sur le « racisme systémique » peut coûter 100 000 dollars aux États-Unis…

Les consultants de McKinsey ont raison de dire que « la diversité est un avantage concurrentiel faisant gagner des parts de marché aux entreprises les plus vertueuses ». Mais pas pour les raisons qu’ils avancent. Ils vendent plutôt une arme arrosée d’eau bénite « woke » aux multinationales dont on sait les tendances prédatrices…
La sélection
Diversité et inclusion en entreprise : quand les loups se déguisent en agneaux
The problem with the diversity dividend
Quillette
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