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À Munich, J.D. Vance a abordé sans détour les questions qui fâchent

Par Philippe Oswald. Synthèse n°2406, Publiée le 22/02/2025 - Photo : Le vice-président américain JD Vance prononce son discours lors de la 61e Conférence de Munich sur la sécurité (MSC) à Munich, le 14 février 2025.. Crédits : Photo de Thomas Kienzle / AFP
Ça ne se fait pas mais il l'a fait. J.D. Vance, le jeune vice-président des États-Unis, a interpellé les dirigeants européens réunis à Munich sur les atteintes à la liberté d'expression et sur l'immigration massive. Dans un silence de cathédrale, il les a carrément exhortés à « changer de cap » ! « N'ayez pas peur ! » a ajouté ce catholique en citant Jean-Paul II.

« Affreusement mal élevé ! » C'est en somme la critique majeure qu'ont formulée (mezza voce) à l'encontre du nouveau vice-président des États-Unis James David Vance, les principaux délégués à la Conférence de Munich sur la sécurité. Ils l'avaient invité à prendre la parole au premier jour de cette rencontre qui s'est tenue du 14 au 16 février à l'hôtel « Bayerischer Hof » de la capitale bavaroise. Devant un parterre de dirigeants européens « sidérés », relève RMC/BFM, James David Vance ne s'est pas privé d'aborder les sujets qui fâchent face aux chefs d'État et de gouvernement européens, aux ministres et aux nombreux représentants d'ONG qui participent traditionnellement à ce forum annuel consacré aux questions de sécurité internationale (historique de ces rencontres sur le site du ministère fédéral (allemand) des Affaires étrangères).

Vance a carrément dénon une dérive liberticide des démocraties libérales et les a invitées à « changer de cap » face à « l'immigration de masse ». (L'intégralité de son discours traduit en français dans Le Figaro du 15 février 2025.) Son avertissement n'est pas sans rappeler celui que Soljenitsyne avait lancé aux Occidentaux, il y a près d'un demi-siècle, dans son célèbre discours d'Harvard (« Le déclin du courage », 8 juin 1978). Sans s'embarrasser de précautions oratoires, le bras droit de Donald Trump a interpellé les dirigeants européens : « Écoutez ce que votre peuple vous dit ! ». Dans un ardent plaidoyer pour « la liberté d'expression », il a dénoncé la multiplication de lois restreignant cette liberté fondamentale (protégée par le Premier amendement de la Constitution des États-Unis) dans la plupart des pays européens. Curieusement ces restrictions, qui s'apparentent à de la censure, frappent prioritairement voire exclusivement les propos qualifiés de « conservateurs », « réactionnaires », « d'extrême-droite », voire de « fascistes ». Souvent stigmatisées en tant que « phobies » ou « fausses nouvelles » (« fake news »), ces prises de position à contre-courant valent parfois à leurs auteurs et aux médias qui les publient, des condamnations pénales pouvant aller jusqu'à la prison ou à l'interdiction. En Grande-Bretagne, un chrétien s'est retrouvé en prison pour avoir prié (en silence) à proximité d'une clinique pratiquant l'IVG. La Roumanie, quant à elle, a vu en décembre dernier l'annulation de l'élection présidentielle par la Cour constitutionnelle pour des soupçons d'ingérence russe, alors que le candidat nationaliste Calin Georgescu était arrivé en tête du premier tour. L'ancien commissaire européen Thierry Breton s'en est félicité. Si Vance n'a pas cité la France dans les exemples de censure qu'il a dénoncés, notre pays s'est singularisé quelques jours plus tard (le 20 février) en devenant la première démocratie occidentale à fermer purement et simplement une grande chaîne populaire de télévision, C8 (n°1 sur la TNT avec 40 millions de téléspectateurs mensuels), après la validation par le Conseil d'État de l'interdiction, fulminée par l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM).

Dans le Journal de Montréal du 18 février, l'éditorialiste et essayiste Mathieu Bock-Côté estime que « le discours de J.D. Vance à Munich n'avait rien de scandaleux ». En effet, explique-t-il, le vice-président américain, sans nier la menace que font planer la Russie ou la Chine sur les pays occidentaux, les a mis en garde contre un péril déjà à l'œuvre insidieusement en leur sein : l'autodestruction. « La caste qui la dirige et qui prétend sans cesse défendre ‘notre démocratie' l'a plongée dans un régime où la censure, le déni de la souveraineté populaire et la submersion migratoire s'imposent à elle comme son horizon indépassable », résume l'éditorialiste québécois. À ses yeux, les trois principales accusations de Vance ont fait mouche : « Premier point : c'est un fait qu'en Europe, les lois visant à resserrer le périmètre de la liberté d'expression se sont multipliées ces dernières années. (…) Deuxième point : Vance note que les élites européennes se méfient de leurs peuples. (…) Troisième point : Vance rappelle que, jamais les peuples européens n'ont été consultés pour savoir s'ils acceptaient l'immigration massive qui a transformé radicalement leur continent, et qui est vécue par plusieurs comme une contre-colonisation. »

Interviewé par Atlantico le 21 février 2025 (en lien également ci-dessous), Frédéric Robert, Maître de Conférences en civilisation américaine à la Faculté des Langues de l'Université Jean Moulin (Lyon III), dresse le portrait de « J.D. Vance, ce francophile qui fait peur à (une partie de) la France ». En résumé, ce qui inquiète certains Français et en attire d'autres, c'est l'accent qu'il met « sur le fossé (...) entre les élites nanties qui sont au pouvoir » et les citoyens ordinaires. « Le message est clair : le peuple doit reprendre le contrôle du pays (...) et cela pourrait bien se produire en France d'autant que les Français deviennent de plus en plus méfiants de leurs institutions et de leurs dirigeants », conclut Frédéric Robert.

La sélection
JD Vance, ce francophile qui fait peur à (une partie de) la France
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