International
Quand le virus arrache tous les masques
L'Union européenne est-elle une illusion appartenant au passé, pour paraphraser un célèbre essai de François Furet ? Dans une tribune au Figarovox, Pierre-Henri d’Argenson, spécialiste de questions internationales, énumère « trois choses absolument frappantes » qui doivent l'inciter à se remettre en cause :
1. « Chacun est rentré chez soi. Finis les citoyens du monde, urbains, consuméristes et nomades. (...) Le touriste, l’étudiant, l’homme d’affaires sont redevenus (…) ce qu’ils ont toujours été : des étrangers ». Au pays de la mondialisation heureuse, ce mot pointait au lexique de l’extrémisme. Si on promeut toutes les orientations sexuelles, des différences d’un autre type étaient bannies. Et voilà qu’elles surgissent ici sous une lumière crue.
2. Chacun pour soi, ce que Pierre-Henri d’Argenson appelle « la quasi-absence de solidarité internationale. (…) Le virus n’a [pas] été traité comme un ennemi commun de l’humanité. » Cette crise « oblige les élites européennes à admettre (…) que la nation reste la brique fondamentale de la société mondiale ». À dire vrai, rien n'oblige les élites européennes à quoi que ce soit puisqu'elles ne sont soumises à aucun vote populaire.
3. « La nouvelle guerre froide est structurée par l’axe Chine-États-Unis. » C’est le retour, observe-t-il, à « la grande politique des alliances, tombée en désuétude avec (…) l’illusion d’un grand marché global post-national ».
Tout ce qui constitue l'UE peut se résumer à un marché unique facilitant l’accès à 27 économies différentes. L'ennui, note Pierre-Henri d’Argenson, c'est que « l’idée de "doux commerce" répandue par les courants libéraux depuis le XIXe siècle a vécu. » Il faut revoir le projet des pères fondateurs car l’Europe, loin d'être à la marge, devient le terrain de jeu d'un match qui la dépasse, entre Pékin-Washington. « Si l’UE poursuit sa trajectoire, écrit-il, (…) l’Européen de 2030 (plutôt celui du Sud, dont le Français) travaillera à bas coût pour un groupe chinois, sera surveillé par des technologies chinoises et des logiciels américains, consommera encore plus de sous-culture américaine, n’aura plus qu’un accès payant à la santé, et aura perdu sa liberté ». Sans sortir du cadre, Pierre-Henri d’Argenson préconise trois choses :
1. « Recentrer l’Europe sur son marché intérieur ». Mais comment faire quand la Commission européenne, par le biais d’accords de libre-échange, va dans le sens inverse ? En principe, celle-ci tire son pouvoir des compétences que les États-membres lui assignent.
2. Sa seconde action concerne « la maîtrise des frontières physiques ». La crise montre ici qu’elle est réalisable.
3. Troisième axe : « ressouder le bloc de l’Ouest sur une base plus équilibrée avec les États-Unis, mais non tournée contre la Russie. » Mais vu l'attitude des ex-pays communistes, quelle position commune peut-on escompter ? Il dépend de Washington de « passer d’une logique de protectorat à une stratégie d’alliance ». Face à la montée en puissance de la Chine, les États-Unis vont-ils mieux traiter leurs « alliés » européens ? Qui se soucie de lever l’ambiguïté de nos relations transatlantiques ? Les media focalisent sur Donald Trump mais le vrai sujet, ce serait « une révolution de la pensée stratégique américaine, dont le renoncement (...) au privilège d’extraterritorialité de son droit ».
La crise malmène nos illusions, qu'il s'agisse du rêve européen ou de « l'ami » américain. Avec l'UE, rien n'est possible mais sans l'UE, tout est impossible. Comme sous la guerre froide, le Vieux continent se retrouve au centre des enjeux. D'où l'urgence d'une réponse géopolitique. Plus aucun discours ne peut masquer la réalité mise à nu par cette crise. Pierre-Henri d’Argenson prévient que « le niveau de tolérance pour l’immobilisme risque (…), après le déconfinement, de dangereusement se réduire ».
1. « Chacun est rentré chez soi. Finis les citoyens du monde, urbains, consuméristes et nomades. (...) Le touriste, l’étudiant, l’homme d’affaires sont redevenus (…) ce qu’ils ont toujours été : des étrangers ». Au pays de la mondialisation heureuse, ce mot pointait au lexique de l’extrémisme. Si on promeut toutes les orientations sexuelles, des différences d’un autre type étaient bannies. Et voilà qu’elles surgissent ici sous une lumière crue.
2. Chacun pour soi, ce que Pierre-Henri d’Argenson appelle « la quasi-absence de solidarité internationale. (…) Le virus n’a [pas] été traité comme un ennemi commun de l’humanité. » Cette crise « oblige les élites européennes à admettre (…) que la nation reste la brique fondamentale de la société mondiale ». À dire vrai, rien n'oblige les élites européennes à quoi que ce soit puisqu'elles ne sont soumises à aucun vote populaire.
3. « La nouvelle guerre froide est structurée par l’axe Chine-États-Unis. » C’est le retour, observe-t-il, à « la grande politique des alliances, tombée en désuétude avec (…) l’illusion d’un grand marché global post-national ».
Tout ce qui constitue l'UE peut se résumer à un marché unique facilitant l’accès à 27 économies différentes. L'ennui, note Pierre-Henri d’Argenson, c'est que « l’idée de "doux commerce" répandue par les courants libéraux depuis le XIXe siècle a vécu. » Il faut revoir le projet des pères fondateurs car l’Europe, loin d'être à la marge, devient le terrain de jeu d'un match qui la dépasse, entre Pékin-Washington. « Si l’UE poursuit sa trajectoire, écrit-il, (…) l’Européen de 2030 (plutôt celui du Sud, dont le Français) travaillera à bas coût pour un groupe chinois, sera surveillé par des technologies chinoises et des logiciels américains, consommera encore plus de sous-culture américaine, n’aura plus qu’un accès payant à la santé, et aura perdu sa liberté ». Sans sortir du cadre, Pierre-Henri d’Argenson préconise trois choses :
1. « Recentrer l’Europe sur son marché intérieur ». Mais comment faire quand la Commission européenne, par le biais d’accords de libre-échange, va dans le sens inverse ? En principe, celle-ci tire son pouvoir des compétences que les États-membres lui assignent.
2. Sa seconde action concerne « la maîtrise des frontières physiques ». La crise montre ici qu’elle est réalisable.
3. Troisième axe : « ressouder le bloc de l’Ouest sur une base plus équilibrée avec les États-Unis, mais non tournée contre la Russie. » Mais vu l'attitude des ex-pays communistes, quelle position commune peut-on escompter ? Il dépend de Washington de « passer d’une logique de protectorat à une stratégie d’alliance ». Face à la montée en puissance de la Chine, les États-Unis vont-ils mieux traiter leurs « alliés » européens ? Qui se soucie de lever l’ambiguïté de nos relations transatlantiques ? Les media focalisent sur Donald Trump mais le vrai sujet, ce serait « une révolution de la pensée stratégique américaine, dont le renoncement (...) au privilège d’extraterritorialité de son droit ».
La crise malmène nos illusions, qu'il s'agisse du rêve européen ou de « l'ami » américain. Avec l'UE, rien n'est possible mais sans l'UE, tout est impossible. Comme sous la guerre froide, le Vieux continent se retrouve au centre des enjeux. D'où l'urgence d'une réponse géopolitique. Plus aucun discours ne peut masquer la réalité mise à nu par cette crise. Pierre-Henri d’Argenson prévient que « le niveau de tolérance pour l’immobilisme risque (…), après le déconfinement, de dangereusement se réduire ».