Merck, l'ivermectine et le molnupiravir
Santé

Merck, l'ivermectine et le molnupiravir

Par Peter Bannister. Synthèse n°1463, Publiée le 22/12/2021
À l’heure de l’arrivée du variant omicron, potentiellement capable d’échapper à l’immunité vaccinale, la question d’autres traitements contre le covid-19 – âprement débattue depuis les controverses autour de l’hydroxychloroquine – revient en force, concernant de nouveaux produits pharmaceutiques (antiviraux, anticorps mono – ou polyclonaux) mais aussi des substances existantes telles que l’ivermectine (IM).

Les médias de la Trusted News Initiative (combattant la "désinformation anti-vaccin") ont martelé que l'OMS ne recommande pas l'IM, un antiparasitaire très connu, contre le covid. Si les critiques les plus modérées évoquent des essais cliniques inconclusifs, un article anti-IM de la BBC parle carrément de "fausse science" derrière ce "médicament miracle". Aux États-Unis, on l’a dénigré comme un "vermifuge pour chevaux". En août, Rolling Stone a affirmé que des hôpitaux regorgeaient de patients ayant pris des doses vétérinaires d'IM pour le covid. La FDA (Food and Drug Administration) a tweeté : "Vous n'êtes pas un cheval. Vous n'êtes pas une vache". On a ensuite prouvé que l'histoire était erronée, mais seulement après sa diffusion par le Washington Post, l’Associated Press et le New York Times, qui ont tous été obligés de revoir leur copie.

De l’autre côté, de nombreuses voix taxent les autorités sanitaires de "nihilisme thérapeutique" pour leur refus des traitements précoces. 15 000 scientifiques et médecins ont signé une déclaration demandant l'arrêt des pressions contre des médecins appliquant de tels protocoles, où l'IM apparaît fréquemment. En France, de nombreux médecins ont émis des avis semblables lors du récent « Doctothon », tout comme le collectif « Laissez les médecins prescrire », dont le manifeste a obtenu plus de 119 000 signatures.

La question de savoir si les essais cliniques valident l'IM reste ouverte. Pourtant, elle a déjà été largement utilisée sur le terrain avec des résultats apparemment excellents. Dans l'état indien d'Uttar Pradesh (241 millions d'habitants), où l’IM a été fortement promue, on ne relevait que 198 cas actifs de covid-19 au 20 septembre malgré l’infectivité du variant Delta et un taux de vaccination de seulement 11%. L'IM a aussi été recommandée ailleurs, notamment par le président de l'Association médicale de Tokyo ou dans certains pays d'Amérique latine dont le Salvador, où elle est désormais distribuée gratuitement à tous.

Par ailleurs, le livre récent The Real Anthony Fauci par Bobby F Kennedy Jr. a sérieusement mis en cause la neutralité des études scientifiques sur l’IM. Kennedy inclut la transcription d’un dialogue concernant l’IM entre la Dr Tess Lawrie et Andrew Hill de l’Université de Liverpool, au cours duquel ce dernier, en principe très favorable à l’ivermectine, admet avoir subi des pressions pour changer la conclusion positive d’une grande étude sur l’IM de la part d’UNITAID – une ONG liée à la Fondation Gates qui aurait donné $40 millions à l’Université quatre jours avant la publication de l’étude. Cette transcription confirme les allégations de Tess Lawrie publiées par FranceSoir en mars 2021. Si certains ont longtemps affirmé que la campagne contre les traitements précoces a été orchestrée par les partisans des vaccins (pour maintenir l’impression d’une absence totale d’autres voies thérapeutiques), cette hypothèse semblerait de plus en plus difficile à réfuter.

Un aspect paradoxal de cette controverse concerne le fabricant de l’IM, Merck, qui a déconseillé début 2021 son usage contre le covid. Prise de distance surprenante, sauf si l'on considère qu'en juin 2021, Merck a conclu un contrat de 1,2 milliard de dollars avec le gouvernement américain pour le molnupiravir, une pilule antivirale censée réduire de 50% les hospitalisations et décès dus au covid-19 dans ses formes légères à modérées. Une copie du contrat obtenue par Knowledge Ecology International indique que le prix du cours de traitement (5 jours) était de 712$ ; une étude anglo-américaine a estimé le coût de production à 17,74$.

Salué initialement comme révolutionnaire, notamment par Bill Gates, prêt à investir $120 millions pour le promouvoir, le molnupiravir n’a pourtant pas le vent en poupe à l’heure actuelle. Son efficacité revue à la baisse (30% au lieu de 50%), le comité consultatif de la FDA ne l’a approuvé qu’après un vote serré, la Haute Autorité de la Santé se prononçant contre son autorisation en France le 9 décembre. Au moment où d’autres fabricants sortent des traitements anti-covid (paxlovid de Pfizer, anticorps de synthèse d’Astrazeneca) il n’est pas sûr que Merck ait trouvé la combinaison gagnante. Surtout quand une nouvelle étude sortie en pre-print, effectuée sur 200 000 personnes au Brésil, semble indiquer que son propre produit l'ivermectine (brevet expiré, donc non rentable) serait d’une efficacité préventive considérable contre le covid-19.
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