Christianisme

Maria Valtorta, grande visionnaire ou romancière exceptionnelle

Par Olivier Bonnassies. Synthèse n°2422, Publiée le 14/03/2025 - Photo : Maria Valtorta, auteur religieuse italienne et mystique alitée, à l'époque de ses mystérieuses visions. Crédits : ©Wikimedia Commons, image du domaine public
Maria Valtorta (1897-1961) est une mystique catholique qui a grandi en Italie, à Viareggio. Une blessure grave au dos, en 1925, l'a conduite à rester alitée. Malgré ses souffrances physiques, elle a mené une vie de grande piété, se consacrant à la prière et à l'écriture. Elle est connue pour avoir écrit « Le poème de l'Homme-Dieu », une œuvre monumentale rassemblant près de 700 visions et dictées qu'elle dit avoir reçues de Jésus-Christ et de la Vierge Marie. Ce que conteste une série de prises de position d'autorités de l'Église catholique. Mais une lettre récente, encore peu connue, signée de la main du pape François, encourage à faire connaître activement Maria Valtorta et son « œuvre littéraire » pour « le bien de l'Église et de la société ».

Un court communiqué du Vatican sur les écrits de la mystique catholique italienne Maria Valtorta vient de mettre en émoi le petit monde catholique français. Le texte publié en italien par le Dicastère pour la Doctrine de la Foi (ex Saint-Office), en date du 22 février dernier, indique que « les prétendues visions et révélations contenues dans les écrits de Maria Valtorta (...) ne peuvent être considérées comme d'origine surnaturelle ». Les grands médias catholiques et Wikipédia ont relayé l'information en évoquant une « condamnation » de l'œuvre principale de Maria Valtorta, intitulée en français « L'Évangile tel qu'il m'a été révélé » (le titre originel italien « Le poème de l'Homme-Dieu », sans doute meilleur, ne donne pas l'impression de concurrencer l'Evangile). Mais il semble que le communiqué du Vatican n'apporte, en réalité, rien de nouveau. Comme une note de la Conférence des Évêques de France, qui avait déjà mis en garde, en 2021, contre l'idée que de telles « méditations » puissent remplacer l'Évangile , il s'inscrit dans une longue série de réserves et de controverses entre des institutions et personnalités d'Église - jusqu'au pape François lui-même - au sujet de cette mystique qui connait un succès d'édition croissant.

En réalité, la dernière enquête du Vatican sur Maria Valtorta date de 1959, et elle aboutit l'année suivante à une mise à l'Index de ses écrits. La censure du Saint-Office avait, à l'époque, des réticences envers les mystiques et elle s'opposa aussi à sainte Faustine Kowalska (mise à l'Index en mars 1959), à saint Padre Pio (combattu à partir de juillet 1960), ou à mère Yvonne-Aimée de Malestroit (procès interrompu en juin 1960 car « trop de miracles »). Mais l'Église ne prétend aucunement à l'infaillibilité dans ce type de jugement : en canonisant Padre Pio et Faustine Kowalska, elle reconnaît les manques de discernement passés, comme cela arrive souvent. On peut citer à ce sujet le cas emblématique de Jeanne d'Arc, condamnée à être brûlée vive sur la base de 70 faux chefs d'accusation, qui sera finalement canonisée 500 ans plus tard, ou l'exemple de Medjugorje, combattu et déclaré « non surnaturel » pendant des décennies, avant de recevoir finalement en 2024, le plus haut degré d'approbation possible selon les nouvelles normes.

Ce qui interroge aujourd'hui, c'est que le texte du Vatican affirme que les visions de Maria Valtorta « ne peuvent être considérées comme d'origine surnaturelle » et qu'elle ne serait en fait qu'une romancière très imaginative. Or, ses 9 000 pages écrites à la main, d'une traite, sans la moindre rature, décrivent 750 personnages dont 230 validés par des sources historiques (comme le montre le dictionnaire publié par François-Michel Debroise et son site encyclopédique), 70 groupes ethniques, 220 villages, 110 sites géographiques, 150 plantes, 200 espèces animales, 50 espèces minérales et 24 000 détails concrets vérifiés et validés sans erreurs ni anachronismes par Jean-François Lavère qui, de son côté, a publié sur la géographie extraordinaire des visions. On aurait pu arguer que cela pouvait aussi venir du diable, ou être mêlé, mais comment une femme clouée au lit aurait-elle pu « romancer » tout cela, seule, sans aide, grâce à de simples « méditations » ?

Plus étonnant encore : le polytechnicien Jean Aulagnier a pu reconstituer un « calendrier de Jésus au jour le jour. » À partir des 5 000 indications spatio-temporelles contenues dans les visions, il est parvenu à déterminer la date de chaque scène de l'Évangile dans notre calendrier actuel (datations consultables sur le site Valtorta.fr). A sa grande stupéfaction, il a ensuite constaté que cette reconstitution était parfaitement cohérente avec le calendrier des phases lunaires (indépendant) sur plus d'une centaine de visions qui décrivent la position et les phases de la Lune. Il y a vu, parmi bien d'autres détails sidérants, « une preuve à la saint Thomas » du caractère surnaturel de cette œuvre unique au monde qui mérite, selon lui, d'être « bien plus largement connue ».

Les réserves du Vatican sont également tempérées par d'autres prises de position importantes : le pape Pie XII a lu l'œuvre et a dit : « Publiez, qui lira comprendra » ; après sa mort, le corps de Maria Valtorta a été transféré en 1973 dans la basilique de la Santissima Annunziata de Florence ; depuis quelques années, Mgr Giulietti, l'évêque du diocèse de Maria Valtorta, célèbre l'anniversaire de son décès avec des homélies de plus en plus positives : « Ce qu'elle écrit, dans certaines parties, ne peut pas être simplement d'origine naturelle » ; et last but not least, en réponse à un envoi du professeur Liberato di Caro (cf. son interview à 1h03'00), Don Ernesto Zucchini et la Fondation Maria Valtorta ont reçu de la Secrétairerie d'Etat du Vatican, une lettre signée du pape François, datée du 24 février 2024 : « Je vous encourage à poursuivre avec enthousiasme votre mission de faire connaître la vie de Maria Valtorta et son œuvre littéraire, et tout ce qu'elle peut offrir pour le bien de l'Église et de la société. En avant ! »

On peut aussi se référer aux grands théologiens et sommités mondiales qui l'ont étudiée. Par exemple, le père Gabriel Roschini (1900-1977), de renommée internationale, fondateur de l'Institut théologique pontifical Marianum à Rome, auteur de 125 livres : « La mariologie qui se dégage des écrits de Maria Valtorta a été pour moi une vraie découverte. Aucun autre écrit marial, pas même la somme de tous ceux que j'ai lus et étudiés, n'avait été en mesure de me donner sur Marie, chef-d'œuvre de Dieu, une idée aussi claire, aussi vive, aussi complète, aussi lumineuse et aussi fascinante, à la fois simple et sublime. »

En 2011, Mgr René Laurentin (1917-2017) se positionna aussi favorablement. Expert au Concile et mariologue de réputation internationale, il a jugé Maria Valtorta comme étant la plus crédible des quatre grandes mystiques examinées lors de son étude comparative réalisée avec François-Michel Debroise. Et pour le bienheureux Gabriel Maria Allegra (1907-1976), prêtre, bibliste et linguiste franciscain, fondateur du Studium Biblicum Franciscanum à Hong Kong, béatifié en 2012 par Benoît XVI, l'œuvre est un « écrin de trésors célestes » : « Je ne crois pas qu'il soit sage et juste de rester indifférent devant de tels trésors. »

Alors, plus grande visionnaire du monde ou romancière extraordinaire ? A vous de choisir, mais peut-être faut-il pour cela ouvrir le dossier et suivre la recommandation de saint Paul : « N'éteignez pas l'Esprit Saint, ne méprisez pas le don de prophétie, mais vérifiez tout, et ce qui est bon, gardez-le » (1 Th 5,19-21). Les écrits de Maria Valtorta, qui touchent de plus en plus de monde, ne doivent évidemment jamais être mis au niveau des Evangiles, qui sont pour les chrétiens uniques et normatifs ; ils méritent cependant notre attention, car il n'y a aucun équivalent de cette œuvre dans toute la littérature mondiale. Mais, comme ce sujet déchaîne les passions, ceux qui s'y intéressent devraient se souvenir du sage conseil de saint Ignace de Loyola : « Sur l'essentiel, l'unité ; sur le reste, la liberté ; en tout, la charité. »

La sélection
Maria Valtorta, un don de Dieu validé par la science
Voir la vidéo sur la chaîne Youtube Marie de Nazareth
S'abonner gratuitement
Ajoutez votre commentaire
Valider
Pourquoi s'abonner à LSDJ ?

Vous êtes submergé d'informations ? Pas forcément utiles ? Pas le temps de tout suivre ?

Nous vous proposons une sélection pour aller plus loin, pour gagner du temps, pour ne rien rater.

Sélectionner et synthétiser sont les seules réponses adaptées ! Stabilo
Je m'abonne gratuitement
LES DERNIÈRES SÉLECTIONS
Lire en ligne
Lire en ligne
Lire en ligne
Lire en ligne
Lire en ligne
Lire en ligne
Lire en ligne