Macron, fin de magie
Politique

Macron, fin de magie

Par Philippe Oswald. Synthèse n°1617, Publiée le 20/06/2022
Le second tour des législatives a déchiré le rideau de l’illusionniste : avec son Ensemble ! privé de majorité absolue, et l’entrée en force de la gauche Nupes et de la droite RN à l’Assemblée nationale, plus un parti LR qui se maintient vaille que vaille, le roi Macron apparaît nu ! La coalition présidentielle forme certes le groupe le plus nombreux, mais avec seulement 245 députés, cette majorité « relative » est loin du minimum de 289 députés requis pour faire voter une loi. Fini, un parlement à sa botte ! L’appel au « sursaut républicain » que le président avait lancé devant l’avion qui allait l’emmener en Ukraine n’a pas ému les foules ; il a même sans doute renforcé la détermination de ses adversaires, désignés indirectement comme « non républicains » ... Le « cordon sanitaire », le « front anti-Le Pen » puis le « front anti-Mélenchon » ont laissé place à un « front anti-Macron ».

La déconfiture du parti présidentiel est symbolisée par la défaite de deux de ses principales figures : Richard Ferrand, président de l’Assemblée nationale, et Christophe Castaner, ancien ministre de l’Intérieur devenu président du groupe LREM. Eliminées elles aussi au second tour, Amélie de Montchalin (Planification écologique) et Brigitte Bourguignon (Santé), deux ministres qui venaient d’être nommées à ces postes-clés, ainsi que la secrétaire d'État Justine Bénin (Mer), doivent quitter le gouvernement. Quant à Elisabeth Borne, bien qu’élue, sera-t-elle maintenue à son nouveau poste de premier ministre ? Cette parfaite technocrate peu charismatique ne paraît pas avoir l’étoffe d’un barreur de gros temps (pour retourner l’expression « barreur de petit temps » dont Roland Dumas, vieux complice de François Mitterrand, avait jadis affublé Michel Rocard).

Un soulagement : le score de la Nupes (131 députés) reste bien en deçà du raz-de-marée annoncé. Mélenchon ne sera pas premier ministre, il n’imposera pas une cohabitation. En outre, chacun des partis qui composent cette alliance hétéroclite va « reprendre ses billes » à l’Assemblée, avec des objectifs souvent contradictoires : les écologistes sont vent debout contre le nucléaire, pas les communistes ; les socialistes défendent (encore) une laïcité logiquement incompatible avec le communautarisme de la France insoumise ; et entre ces partis ou en leur sein, on peut s’attendre à de rudes empoignades entre féministes et islamo-gauchistes, entre partisans du mariage homosexuel et défenseurs du burkini.

Le grand vainqueur est le Rassemblement national (RN) de Marine Le Pen. Cette fois, le « plafond de verre » a volé en éclats. Bien que défavorisé par le mode de scrutin uninominal, le RN obtient 89 députés, deux fois plus que le Front National en 1986 (le FN avait décroché 35 députés à la faveur d’une éphémère instauration de la proportionnelle). Le RN dispose d’un groupe à l’Assemblée nationale et, si les partis coalisés de la Nupes ne parviennent pas à s’entendre, peut légitimement disputer à la France insoumise (72 députés) la présidence de la Commission des finances. Mais pour quoi faire ? Bloquer l’âge de la retraite à 60 ans, de concert avec l’extrême gauche ?

Les macronistes devront composer avec Les Républicains… ce qui pourrait bien être un nouveau piège pour ceux-ci, encore que plusieurs des 61 députés LR qui ont été élus ou réélus (auxquels s'ajoutent 3 UDI) semblent être parmi les moins disposés à des « arrangements » avec la Macronie. Mais peut-être Emmanuel Macron cédera-t-il à la tentation de substituer « l’alternativement » au « en même temps », en godillant, un coup à droite, un coup à gauche, ce qui promet de furieuses joutes à l’Assemblée, au risque que la fièvre parlementaire gagne le pays. L’apathie dont une majorité d’électeurs est accusée à cause d’une abstention restée stratosphérique (53,77%) n’est-elle pas le calme trompeur qui précède la tempête ? Mais après tout, un navire est fait pour traverser les tempêtes ; le pire danger survient quand le capitaine a totalement perdu le cap… Pour le politologue Jérôme Sainte-Marie interviewé par Le Figaro (en lien ci-dessous), le faible score de la majorité présidentielle, le relatif succès de la Nupes et la poussée du RN marquent un tournant critique de notre vie politique.
La sélection
Macron, fin de magie
Jérôme Sainte-Marie : « Une crise politique larvée éclate au grand jour »
Le Figaro
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