International
Le rôle central de la Chine pour contenir la guerre en Ukraine
C’était le 8 mars dernier, soit deux semaines après le début de l’offensive russe en Ukraine. La Pologne venait d’offrir sa flotte d’une trentaine de MiG-29 à son voisin agressé avec l’assentiment de Washington. Mais les Américains sont revenus sur leur décision en interdisant ce don, à la surprise de leur allié… La Chine était derrière ce revirement. L’impact opérationnel du renfort d’avions dépassés (ils datent du début des années 80) était négligeable mais le symbole trop lourd de conséquences pour Pékin. Owen Matthews révèle pour The Spectator (voir son article en lien) le rôle central – et discret – de la Chine depuis le début de l’offensive russe pour limiter les risques d’escalade. Ce sont les Chinois encore qui semblent agir dans l’ombre pour que Joe Biden fasse pression sur Zelenski en vue d’accepter l’ouverture de pourparlers…
L’activité diplomatique intense de Wang Yi, ministre chinois des affaires étrangères, avec l’OTAN et les États-Unis depuis le mois de septembre, a porté ses fruits. Lors d’une rencontre avec Joe Biden en marge du G20 à Bali mi-novembre, Xi Jinping a déclaré que le monde « devait éviter une crise nucléaire sur le continent eurasien ». Il faut admettre que la position chinoise a été difficile à cerner depuis février 2022 – Pékin ayant dit aux deux camps ce qu’ils voulaient entendre. En mars, Wang Yi accusait les États-Unis de souffler sur les braises et, le mois dernier, réitérait son soutien à Vladimir Poutine pour « unir et diriger le peuple russe ». Pourtant, en marge de l’assemblée générale de l’ONU en septembre, le même Wang Yi affirmait à Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, que la Chine désirait développer des relations bilatérales avec l’organisation chapeautée par Washington… En fait, la Chine poursuit ses intérêts et ne veut surtout pas s’ancrer dans un camp. C’est justement l’illusion d’une « nouvelle amitié sans limites » proclamée par Xi Jinping le 4 février, alors qu’il recevait à Pékin Vladimir Poutine, qui a conduit ce dernier à tenter son coup de poker sur Kyiv. Les Chinois savaient que les Russes étaient sur le point d’attaquer. Ils avaient juste exigé d’attendre jusqu’au 20 février, date de la fin des Jeux Olympiques d’hiver sur leur sol. La présentation des Russes leur convenait : une opération limitée pour récupérer une province et réunifier la Russie dans ses frontières historiques. C’était tout à fait cohérent avec le narratif chinois sur Taïwan !
L’accord d’alliance contenait une annexe confidentielle de soutien militaire réciproque comparable à l’article 5 liant les membres de l’OTAN. Le Kremlin en rêvait depuis longtemps : la Chine promettait d’intervenir en cas d’invasion étrangère en Russie. Mais… les Chinois ont imposé une condition : cette assistance militaire ne pourrait être due dans le cas de territoires récemment annexés par les armes. Pas d’obligation d’aider Moscou en Ukraine en cas de contre-offensive… Or, l’offensive-éclair sur Kyiv a pris les Chinois par surprise : ils s’attendaient à une opération concentrée sur le Donbass. Même Sergeï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, ne connaissait pas les détails 3 jours avant l’attaque. Xi Jinping n’a pas apprécié du tout – même si son gouvernement pointait du doigt l’OTAN comme responsable de la déflagration. Pire ! Dès le 27 février, Vladimir Poutine brandissait la menace d’une escalade nucléaire. L’Armée Populaire de Libération (APL) chinoise a immédiatement pris contact avec l’état-major russe, court-circuitant le canal diplomatique, pour s’assurer que la doctrine d’utilisation de l’arme nucléaire resterait inchangée. La bombe ne saurait être utilisée qu’en réplique à une attaque sur le sol russe. Les hauts gradés chinois ont ensuite contacté leurs homologues américains pour négocier un premier accord : pas de livraison de MiG polonais aux Ukrainiens et, en échange, les Chinois obtiendraient des militaires russes l’assurance que l’arme nucléaire ne serait pas engagée hors des limites de la doctrine officielle.
Cet accord discret entre l’OTAN et la Russie a été orchestré par la Chine. Depuis, la prudence américaine s’explique par la pression de Pékin. Si l’argent a afflué vers Kyiv, la livraison d’armes est restée strictement encadrée. Pas d’avions ni d’hélicoptères de combat, ni de chars modernes ou de missiles de longue portée. En échange, pas de ventes d’armes chinoises à Moscou. Ce qui explique que les Russes aient dû se fournir en Iran pour les drones… Par ailleurs, de nombreuses banques chinoises ont dénoncé leurs accords avec leurs partenaires russes pour éviter de s’exposer à des sanctions occidentales. L’intérêt économique pour la Chine est sans appel : les échanges avec la Russie devraient augmenter de 100 à 130 milliards de dollars quand le commerce avec les États-Unis et l’U.E. représente plus d’1,5 mille milliards de dollars par an.
La Chine s’impose discrètement comme un faiseur de paix incontournable en Ukraine : des frontières garanties à la fois par Pékin côté russe et par l’OTAN côté ukrainien.
L’activité diplomatique intense de Wang Yi, ministre chinois des affaires étrangères, avec l’OTAN et les États-Unis depuis le mois de septembre, a porté ses fruits. Lors d’une rencontre avec Joe Biden en marge du G20 à Bali mi-novembre, Xi Jinping a déclaré que le monde « devait éviter une crise nucléaire sur le continent eurasien ». Il faut admettre que la position chinoise a été difficile à cerner depuis février 2022 – Pékin ayant dit aux deux camps ce qu’ils voulaient entendre. En mars, Wang Yi accusait les États-Unis de souffler sur les braises et, le mois dernier, réitérait son soutien à Vladimir Poutine pour « unir et diriger le peuple russe ». Pourtant, en marge de l’assemblée générale de l’ONU en septembre, le même Wang Yi affirmait à Jens Stoltenberg, secrétaire général de l’OTAN, que la Chine désirait développer des relations bilatérales avec l’organisation chapeautée par Washington… En fait, la Chine poursuit ses intérêts et ne veut surtout pas s’ancrer dans un camp. C’est justement l’illusion d’une « nouvelle amitié sans limites » proclamée par Xi Jinping le 4 février, alors qu’il recevait à Pékin Vladimir Poutine, qui a conduit ce dernier à tenter son coup de poker sur Kyiv. Les Chinois savaient que les Russes étaient sur le point d’attaquer. Ils avaient juste exigé d’attendre jusqu’au 20 février, date de la fin des Jeux Olympiques d’hiver sur leur sol. La présentation des Russes leur convenait : une opération limitée pour récupérer une province et réunifier la Russie dans ses frontières historiques. C’était tout à fait cohérent avec le narratif chinois sur Taïwan !
L’accord d’alliance contenait une annexe confidentielle de soutien militaire réciproque comparable à l’article 5 liant les membres de l’OTAN. Le Kremlin en rêvait depuis longtemps : la Chine promettait d’intervenir en cas d’invasion étrangère en Russie. Mais… les Chinois ont imposé une condition : cette assistance militaire ne pourrait être due dans le cas de territoires récemment annexés par les armes. Pas d’obligation d’aider Moscou en Ukraine en cas de contre-offensive… Or, l’offensive-éclair sur Kyiv a pris les Chinois par surprise : ils s’attendaient à une opération concentrée sur le Donbass. Même Sergeï Lavrov, le ministre russe des affaires étrangères, ne connaissait pas les détails 3 jours avant l’attaque. Xi Jinping n’a pas apprécié du tout – même si son gouvernement pointait du doigt l’OTAN comme responsable de la déflagration. Pire ! Dès le 27 février, Vladimir Poutine brandissait la menace d’une escalade nucléaire. L’Armée Populaire de Libération (APL) chinoise a immédiatement pris contact avec l’état-major russe, court-circuitant le canal diplomatique, pour s’assurer que la doctrine d’utilisation de l’arme nucléaire resterait inchangée. La bombe ne saurait être utilisée qu’en réplique à une attaque sur le sol russe. Les hauts gradés chinois ont ensuite contacté leurs homologues américains pour négocier un premier accord : pas de livraison de MiG polonais aux Ukrainiens et, en échange, les Chinois obtiendraient des militaires russes l’assurance que l’arme nucléaire ne serait pas engagée hors des limites de la doctrine officielle.
Cet accord discret entre l’OTAN et la Russie a été orchestré par la Chine. Depuis, la prudence américaine s’explique par la pression de Pékin. Si l’argent a afflué vers Kyiv, la livraison d’armes est restée strictement encadrée. Pas d’avions ni d’hélicoptères de combat, ni de chars modernes ou de missiles de longue portée. En échange, pas de ventes d’armes chinoises à Moscou. Ce qui explique que les Russes aient dû se fournir en Iran pour les drones… Par ailleurs, de nombreuses banques chinoises ont dénoncé leurs accords avec leurs partenaires russes pour éviter de s’exposer à des sanctions occidentales. L’intérêt économique pour la Chine est sans appel : les échanges avec la Russie devraient augmenter de 100 à 130 milliards de dollars quand le commerce avec les États-Unis et l’U.E. représente plus d’1,5 mille milliards de dollars par an.
La Chine s’impose discrètement comme un faiseur de paix incontournable en Ukraine : des frontières garanties à la fois par Pékin côté russe et par l’OTAN côté ukrainien.