Le départ d'Anthony Fauci : contexte et controverses
Santé

Le départ d'Anthony Fauci : contexte et controverses

Par Peter Bannister. Synthèse n°1677, Publiée le 29/08/2022
Le Dr Anthony Fauci, conseiller auprès de la Maison Blanche et visage public de la politique de santé américaine pendant la pandémie de Covid-19, vient d'annoncer qu'il va bientôt se retirer après 38 ans à la tête de l'Institut National des Allergies et Maladies Infectieuses (NIAID). Dans son annonce, on ne trouve aucune expression de regret concernant sa gestion très critiquée de la crise sanitaire, mais ses opposants avoués, dont le sénateur Rand Paul et le membre du congrès James Comer, ont déjà promis que l'enquête sur les origines de la Covid-19 ne s'arrêtera pas avec le retrait de Fauci, en particulier au sujet de son rôle dans le financement public américain des recherches à l'Institut de virologie de Wuhan à travers l'EcoHealth Alliance de Peter Daszak.

La nouvelle du départ de Fauci arrive alors qu'un nombre croissant de voix appellent à une réévaluation critique des actions des agences gouvernementales aux E.-U. face au SARS-CoV2, dont non seulement le NIAID mais aussi le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies (CDC), et des communications de la Maison Blanche elle-même. Certains de ces appels viennent des insiders; dans une interview au mois de juillet, Deborah Birx, coordinatrice de la réponse au coronavirus sous Donald Trump, a par exemple fait des aveux surprenants concernant la politique de vaccination, déclarant : "Je savais que ces vaccins n'allaient pas protéger contre l'infection. Et je pense que nous avons exagéré au sujet des vaccins. [...] 50% des personnes qui sont mortes de la vague omicron étaient plus âgées, vaccinées." Une autre indication d'une éventuelle révision du récit public concernant la pandémie est venue en août du CDC, qui a révisé ses directives concernant la prévention du covid-19 pour tenir compte du rôle protecteur de l'immunité naturelle après infection. Désormais, ces recommandations ne différencient plus les personnes vaccinées des non-vaccinées ayant eu le covid, ces dernières bénéficiant "d'un certain degré de protection contre les maladies graves du fait de leur infection précédente".

À la lumière de cette admission du rôle de l'immunité naturelle, soutenue depuis longtemps par des scientifiques, tels que le Dr Jay Bhattycharya (Stanford) ou le Dr Martin Kulldorff (Harvard), on peut facilement comprendre les appels à abandonner comme scientifiquement injustifiés les mandats de vaccination (dans les écoles, les villes, les entreprises) et restrictions de voyage affectant les personnes non-vaccinées, illustrées par l'exclusion de Novak Djokovic (non-vacciné mais ayant guéri deux fois du covid) de l'US Open de tennis, qui commence aujourd'hui.

La directrice actuelle du CDC, la Dr Rochelle Walensky, a également qualifié la réponse à la pandémie de "bâclée", ayant notamment été ralentie par le fait d'avoir basé les décisions de l'agence uniquement sur des articles scientifiques ayant été approuvés par comité de lecture, écartant les documents publiés sur les serveurs pre-print qui auraient pu fournir des informations précieuses pour l'élaboration des politiques publiques dans une situation épidémiologique dynamique.

Pour l'épidémiologiste Harvey Risch (Yale School of Public Health), ces aveux sont néanmoins insuffisants, passant à côté des problèmes fondamentaux que sont "la soumission à l'industrie" (pharmaceutique) et "l'incompétence épidémiologique". Pour Risch, la question éthique de l'impact négatif des mesures publiques américaines, tant en termes des effets adverses des vaccins que du coût social des confinements et l'imposition des masques, n'a toujours pas encore été abordée par les autorités, les victimes étant de facto considérées comme des "dommages collatéraux".

Dans ce contexte, un aveu européen concernant les effets indésirables de la vaccination a pourtant défrayé la chronique. Le ministère allemand de la santé a annoncé le 20 juillet que le taux de signalement d'effets indésirables sérieux des vaccins était de 0,2 pour 1000 doses, selon l'Institut Paul Ehrlich. L'exactitude de ce chiffre bien plus élevé que prévu est évidemment difficile à évaluer : d'une part, il s'agit de cas dans lesquels un lien avec la vaccination a été soupçonné plutôt que prouvé, mais d'autre part, de nombreux effets indésirables peuvent ne pas avoir été signalés. Ces données semblent néanmoins aller dans le sens de ceux qui contestent le point de vue du ministre allemand de la santé, Karl Lauterbach, selon lequel les effets indésirables seraient très rares ; les caisses d'assurance maladie allemande (KBV) ont récemment déclaré, en réponse à une demande de membres du parti politique AfD, que 2 478 526 citoyens allemands avaient consulté un médecin concernant d'éventuels effets secondaires post-vaccinaux en 2021. Comme on pouvait s'y attendre, ce chiffre a donné lieu a des accusations d'instrumentalisation politique de la part des opposants à la vaccination. Il est cependant clair que, quelle que soit l'évolution future de la pandémie, le débat sur sa gestion est loin d'être terminé.

 
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