Le coronavirus humilie les autorités chinoises
International

Le coronavirus humilie les autorités chinoises

Par Philippe Oswald. Synthèse n°873, Publiée le 30/01/2020
La toute-puissance chinoise défiée par un virus, c’est insupportable pour l’Etat chinois, autrement dit pour le Parti communiste. Le 22 janvier, par des pressions sur la direction de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), Pékin a mis son veto à une proclamation d’urgence de santé publique de portée internationale face à l’épidémie due au coronavirus (2019-nCoV). Cet épisode, relaté par Le Monde (29 janvier), en rappelle un précédent : la dissimulation par la Chine, pendant plusieurs mois à partir de novembre 2002, de l’épidémie de SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) qui sévissait dans la province de Guangdong. C’est d’ailleurs à la suite de cette censure chinoise que l’OMS avait renforcé son Règlement sanitaire international (RSI), « instrument juridique international qui a force obligatoire pour 196 pays dans le monde » et qui « a pour but d’aider la communauté internationale à prévenir les risques graves pour la santé publique, susceptibles de se propager au-delà des frontières et de constituer une menace dans le monde entier et à y riposter », indique le site de l’OMS. Il faut croire que ce règlement n’a pas empêché l’OMS d’être intimidé par Pékin… Devant la propagation de l’épidémie, le comité d’urgence de l’OMS devait se réunir de nouveau à Genève aujourd’hui pour déterminer si l'épidémie constitue ou non une alerte internationale…

À présent, c’est l’évacuation des étrangers qui vexe le régime chinois. Les efforts des Européens pour rapatrier leurs ressortissants de Wuhan (la mégapole industrielle - jumelée avec Bordeaux - d’où est partie l'épidémie, et où sont présentes notamment les entreprises PSA, Renault, Alstom, SEB) sont perçus comme une mise en doute de la capacité des autorités chinoises à gérer la crise. Les « chinoiseries » bureaucratiques se sont multipliées pour entraver l’évacuation des ressortissants européens. Les avions français et allemands n’avaient pas encore obtenu les autorisations nécessaires pour atterrir à Wuhan le mercredi 29 janvier alors qu’à l’aube de ce même jour, un Boeing 767 affrété par Washington avait décollé de Wuhan en direction de la Californie avec 195 Américains à bord, tandis que le Japon réussissait à rapatrier plus de deux cents de ses ressortissants vers Tokyo. Manifestement, les Etats-Unis et le Japon s’étaient montrés plus persuasifs que les pays européens, bien que l’UE soit le premier partenaire commercial de la Chine. Le premier avion dépêché par la France est parti dans la nuit du 29 au 30 janvier à destination de Wuhan, et devrait revenir vendredi 31 avec 250 personnes évacuées, mais l'horaire, le lieu d'arrivée et de confinement (14 jours) n’ont pas été divulgués. La complexité logistique et sanitaire de l’opération ne suffit pas à expliquer ce flou. Tout en proclamant que la Chine était prête « à travailler avec la communauté internationale », le président Xi Jinping l’a appelée d’emblée à évaluer l’épidémie de façon « objective et raisonnable ». Surtout, ne pas perdre la face ! Message reçu 5/5 par les fonctionnaires chinois qui ne tiennent pas à subir le sort des personnels médicaux ayant pris l’initiative de lancer l'alerte fin décembre à Wuhan : ils auraient été immédiatement emprisonnés ! L’avertissement s’adresse d’ailleurs à n’importe quel Chinois : « L’auteur de tout commentaire sur la crise sanitaire susceptible de troubler l’ordre public est passible de 7 ans de prison » rappellent en boucle les autorités.

Certains s’émerveillent de la capacité mobilisatrice des autorités chinoises pour contrer l’épidémie. Ainsi, à Wuhan, elles ont lancé la construction d’un hôpital de mille lits, exclusivement dédié à l'accueil des malades du coronavirus. Ce gigantesque chantier non-stop est une véritable course contre la montre : lancés le 24 janvier, les travaux doivent s'achever le… 3 février. En outre, un deuxième hôpital de 1300 lits devra sortir de terre en l'espace de deux semaines. Mais pour les défenseurs de la liberté, le traitement de cette crise sanitaire confirme l’étreinte du totalitarisme sur une population déjà surveillée en permanence par les procédés numériques les plus sophistiqués. Seule une dictature particulièrement affûtée est capable, après avoir mis à l’ombre des lanceurs d’alerte, d’imposer la quarantaine du jour au lendemain à quelque 56 millions de Chinois de la province du Hubei (dont 11 millions d'habitants de Wuhan) et d’entraver le rapatriement de milliers d’étrangers.
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Comment la Chine gère la crise sanitaire liée au coronavirus
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