Politique
Le « chevalier » Gaillard, sans peur et sans reproche
Jusqu’à vendredi, le 12h/14h de France Info est « délocalisé ». N’allez pas croire que les journalistes du service public cèdent leur place si chèrement acquise à quelque sous-traitant basané. Leur tiers-mondisme a des limites et les syndicats veillent à ce que le cœur n’empiète pas sur la raison. « Délocalisé » signifie même le contraire. C’est Paris qui « descend », un peu comme Catherine de Médicis et Charles X visitaient leur royaume saccagé par les guerres de religions. De guerre il n’est plus question, même si on peint en rouge la statue de Colbert.
Il s’agit de bataille électorale.
L’une d’elle s’annonce corsée, pour le second tour des municipales dimanche prochain. Les media en parlent comme l’élection « la plus folle de France » : bienvenue à Montpellier (qui se prononce comme « pelle »). Première ville étudiante en densité, la métropole languedocienne borde un rivage magnifique mais (trop) fréquenté par une population fêtarde. Les étés y sont chauds, tout comme les quartiers où M6, filant la police, vient faire sa moisson de cambriolages et d’agressions. Beaucoup de retraités s’installent aussi dans ce sud où le soleil est moins cher que sur la Côte d’Azur. Une forte pression immobilière s’exerce sur une aire de quelque 600 000 habitants. Pendant 27 ans (1977-2004), Montpellier fut cornaqué par feu Georges Frêche, un grand « agité du local » – que les déclarations à l’emporte-pièce situaient à mi-chemin entre les colères de Jean-Luc Mélenchon et la gouaille de Jean-Claude Gaudin. Frêche, le professeur de droit, était un intello de comptoir, matois et mafieux, de gauche pour rouler le système et populiste pour draguer le vote Pieds-noirs. Ses successeurs font figure de pâles régents boulottant l’héritage.
Et donc France Info y était, sur la terrasse de la mairie. Un plateau animé par Marie Bernardeau. En face d’elle, trois candidats : Philippe Saurel, le maire DVG sortant, arrivé en tête le 15 mars, mais avec un résultat décevant de 19,1 % ; son challenger socialiste Michaël Delafosse (16,6 %), qui ne rallia que la liste EELV (7,4 %) ; et le septuagénaire milliardaire d’origine syrienne Mohed Altrad, patron du club de rugby local (13,3 %). Pour rattraper son retard, l’oriental mitonna une alliance byzantine avec trois listes de gauche et écologistes. Aujourd’hui, il rassemble près de 40 % des votants au premier tour. Et dans cette corrida, le fondateur du groupe Altrad réussit à jouer les picadors médiatiques en plantant une belle banderille dans le dos de ses adversaires.
Celle-ci porte un nom : Rémi Gaillard. L'inclassable trublion du net avait frôlé la qualification pour le second tour avec 9,5 % des suffrages. C’est le Montpelliérain le plus connu aujourd’hui. Ce jour-là, on blablate sur l’avenir de la culture quand, sans coup férir, Altrad passe son micro-casque à Rémi Gaillard afin qu’il pose une question (et oui, en extérieur, on ne peut pas fermer à clé un studio…). Marie Bernardeau tergiverse mais finit par céder. France Info va connaître sa minute de spontanéité : « J’ai une question à poser à M. Delafosse (…), lance l’humoriste. J’aimerais que vous répondiez s’il vous plaît aux frais de bouche et de transport de 40 000 € quand vous étiez adjoint à la culture. (…). J’ai fait un simple calcul : en admettant qu’il y ait 25 adjoints comme vous qui dépensent autant d’argent, cela fait un total d’environ 2 millions € sur six ans. Je trouve ça monumental. Et peut-être que monsieur le maire sortant, qui était aussi adjoint à l’urbanisme, pourra m’éclairer là-dessus ». La bombe vient d’exploser. La journaliste donne la parole aux accusés. Michaël Delafosse se dit « très à l’aise », ce qui veut dire l’inverse. L’adjoint s’abrite derrière la chambre régionale des comptes dont les rapports sont publics ! Bel argument… « Et donc il n’y pas plus lieu de débat », clôt-il tout bonnement. En gros, non seulement il se goinfre, ce qu'il ne nie pas, mais en plus c’est légal. Quant à Philippe Saurel, « [il n’est pas] venu pour faire de la comptabilité » (!). Le maire ajoute un poncif d’anthologie : « Ce qui est sûr quand on gère une ville, c’est qu’il faut être attentif aux deniers publics. » Sauf qu'il fait le contraire. C'est toute la saveur des élections locales : la nullité des politiciens dans les media. Alors qu'à Paris, leurs congénères, à force de bouffer du plateau TV, ont de la repartie.
Rémi Gaillard ne comptait pas en rester là mais Marie Bernardeau va enfiler son gilet pare-balles, à savoir son sourire. Avant de se voir couper le micro, le trublion a le temps d’envoyer deux uppercuts à France Info : « Les débats insipides, on en a tous les jours » et « est-ce que les journalistes sont les suppositoires du Parti socialiste ? » On n'a pas la réponse mais si cela s'adresse à des faux culs, c’est plutôt bien vu.
Il s’agit de bataille électorale.
L’une d’elle s’annonce corsée, pour le second tour des municipales dimanche prochain. Les media en parlent comme l’élection « la plus folle de France » : bienvenue à Montpellier (qui se prononce comme « pelle »). Première ville étudiante en densité, la métropole languedocienne borde un rivage magnifique mais (trop) fréquenté par une population fêtarde. Les étés y sont chauds, tout comme les quartiers où M6, filant la police, vient faire sa moisson de cambriolages et d’agressions. Beaucoup de retraités s’installent aussi dans ce sud où le soleil est moins cher que sur la Côte d’Azur. Une forte pression immobilière s’exerce sur une aire de quelque 600 000 habitants. Pendant 27 ans (1977-2004), Montpellier fut cornaqué par feu Georges Frêche, un grand « agité du local » – que les déclarations à l’emporte-pièce situaient à mi-chemin entre les colères de Jean-Luc Mélenchon et la gouaille de Jean-Claude Gaudin. Frêche, le professeur de droit, était un intello de comptoir, matois et mafieux, de gauche pour rouler le système et populiste pour draguer le vote Pieds-noirs. Ses successeurs font figure de pâles régents boulottant l’héritage.
Et donc France Info y était, sur la terrasse de la mairie. Un plateau animé par Marie Bernardeau. En face d’elle, trois candidats : Philippe Saurel, le maire DVG sortant, arrivé en tête le 15 mars, mais avec un résultat décevant de 19,1 % ; son challenger socialiste Michaël Delafosse (16,6 %), qui ne rallia que la liste EELV (7,4 %) ; et le septuagénaire milliardaire d’origine syrienne Mohed Altrad, patron du club de rugby local (13,3 %). Pour rattraper son retard, l’oriental mitonna une alliance byzantine avec trois listes de gauche et écologistes. Aujourd’hui, il rassemble près de 40 % des votants au premier tour. Et dans cette corrida, le fondateur du groupe Altrad réussit à jouer les picadors médiatiques en plantant une belle banderille dans le dos de ses adversaires.
Celle-ci porte un nom : Rémi Gaillard. L'inclassable trublion du net avait frôlé la qualification pour le second tour avec 9,5 % des suffrages. C’est le Montpelliérain le plus connu aujourd’hui. Ce jour-là, on blablate sur l’avenir de la culture quand, sans coup férir, Altrad passe son micro-casque à Rémi Gaillard afin qu’il pose une question (et oui, en extérieur, on ne peut pas fermer à clé un studio…). Marie Bernardeau tergiverse mais finit par céder. France Info va connaître sa minute de spontanéité : « J’ai une question à poser à M. Delafosse (…), lance l’humoriste. J’aimerais que vous répondiez s’il vous plaît aux frais de bouche et de transport de 40 000 € quand vous étiez adjoint à la culture. (…). J’ai fait un simple calcul : en admettant qu’il y ait 25 adjoints comme vous qui dépensent autant d’argent, cela fait un total d’environ 2 millions € sur six ans. Je trouve ça monumental. Et peut-être que monsieur le maire sortant, qui était aussi adjoint à l’urbanisme, pourra m’éclairer là-dessus ». La bombe vient d’exploser. La journaliste donne la parole aux accusés. Michaël Delafosse se dit « très à l’aise », ce qui veut dire l’inverse. L’adjoint s’abrite derrière la chambre régionale des comptes dont les rapports sont publics ! Bel argument… « Et donc il n’y pas plus lieu de débat », clôt-il tout bonnement. En gros, non seulement il se goinfre, ce qu'il ne nie pas, mais en plus c’est légal. Quant à Philippe Saurel, « [il n’est pas] venu pour faire de la comptabilité » (!). Le maire ajoute un poncif d’anthologie : « Ce qui est sûr quand on gère une ville, c’est qu’il faut être attentif aux deniers publics. » Sauf qu'il fait le contraire. C'est toute la saveur des élections locales : la nullité des politiciens dans les media. Alors qu'à Paris, leurs congénères, à force de bouffer du plateau TV, ont de la repartie.
Rémi Gaillard ne comptait pas en rester là mais Marie Bernardeau va enfiler son gilet pare-balles, à savoir son sourire. Avant de se voir couper le micro, le trublion a le temps d’envoyer deux uppercuts à France Info : « Les débats insipides, on en a tous les jours » et « est-ce que les journalistes sont les suppositoires du Parti socialiste ? » On n'a pas la réponse mais si cela s'adresse à des faux culs, c’est plutôt bien vu.
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