Le bilan du covid-19 : lectures contradictoires
Santé

Le bilan du covid-19 : lectures contradictoires

Par Peter Bannister. Synthèse n°1565, Publiée le 20/04/2022
À l'heure actuelle, le variant Omicron B.A.2 du SARS-CoV2 vient de traverser la France – une vague d’infections beaucoup moins médiatisée que les précédentes, éclipsée par l’Ukraine et les élections présidentielles. Mais pouvons-nous désormais consigner la pandémie au passé ainsi que toutes les questions autour de son origine et sa gestion ? Il semblerait plutôt que deux « récits pandémiques » contradictoires se sont durablement installés chez les scientifiques et le public, divisant ceux qui soutiennent encore les mesures employées pendant la crise sanitaire (masques, confinements, vaccination de masse) et ceux qui les critiquent.

La controverse entre les hypothèses d'une origine naturelle du coronavirus et celle d’une fuite d'un laboratoire reste vive. Un long article dans Vanity Fair vient de revoir la question des recherches sur les coronavirus chez les chauves-souris à l’Institut de Virologie de Wuhan et le rôle de son principal partenaire occidental, l'EcoHealth Alliance du zoologue britannique Peter Daszak. L’article traite avec prudence les déclarations rassurantes de Daszak concernant la transparence des recherches en Chine, notant que l'implication des autorités militaires chinoises à Wuhan signifie que les informations partagées avec EcoHealth étaient forcément incomplètes. Parmi de nombreuses zones d’ombre, on peut citer l'effacement d’une base de données de 22 000 échantillons et séquences virales par l'Institut de Wuhan en septembre 2019 pour des raisons inconnues, ainsi que la demande chinoise d’effacer des séquences génomiques tenues par leurs homologues aux États-Unis.

Quant à l'évolution actuelle du virus au niveau international, la situation semble également peu claire. Si les nouveaux variants depuis l’émergence de l’omicron en décembre 2021 semblent pour l'instant aller vers un taux d’infection augmenté mais une virulence diminuée, l'avenir peut encore nous réserver des surprises. Surtout en raison de l'interaction complexe entre la pression infectieuse du virus et la pression immunitaire exercée par des populations hautement vaccinées. Selon le vaccinologue belge Geert Vanden Bossche (vidéo: 4:52:00), ce serait justement la vaccination et la production d'anticorps ciblant exclusivement la protéine spike du virus qui augmenteraient le risque de l'apparition (par sélection naturelle) d'un variant qui non seulement résisterait aux vaccins mais qui serait aussi plus virulent. Et même sans évoquer ce scénario dramatique, il paraît évident que le SARS-CoV2 peut encore impacter les pays peu touchés par le virus, dont la Chine, où les images choquantes du confinement à Shanghai viennent de défrayer la chronique.

En ce qui concerne la vaccination et ses effets adverses (sur lesquels le Senat a ouvert un cycle d’auditions le 28 mars), le débat scientifique reste âpre. Surtout quand la seule façon de maintenir une certaine efficacité, même courte, des vaccins contre les formes graves du covid-19 semble être la multiplication des doses à des intervalles rapprochés. Une stratégie de plus en plus critiquée, y compris par l’Agence Européenne des médicaments, à cause des éventuelles conséquences néfastes pour le système immunitaire. Si les partisans du « tout vaccinal » continuent de nier un rapport entre vaccination et effets adverses graves, leurs arguments peinent à convaincre des voix critiques qui citent non seulement des statistiques mais aussi un nombre croissant d’articles et présentations évoquant des problèmes très divers à court et long terme liés à la vaccination (toxicité de la protéine spike et sa persistance inattendue dans le corps humain suite à la vaccination, myocardites et réactions auto-immunes graves, dérèglement éventuel de mécanismes de défense immunitaires ou de la surveillance de tumeurs/cancers, maladies neuro-dégénératives, phénomènes d’anticorps facilitants…).

En ce qui concerne le traitement du covid, même bras de fer entre tenants de la politique sanitaire et ses opposants. Si les premiers crient « pseudo-science » par rapport aux partisans des traitements précoces en s’appuyant sur des essais randomisés comme l’unique moyen de vérifier l’efficacité d’un produit donné, le camp opposé fait plutôt appel aux données observationnelles pour dire que les traitements précoces – peu chers – qui auraient pu éviter un grand nombre de morts ont été injustement supprimés afin d’ouvrir la voie à la vente massive de produits pharmaceutiques très rentables.

Dans l’absence d’un vrai débat entre ces lectures de la pandémie, on a l’impression que ce sont deux visions de la médecine qui s’entrechoquent. Selon la première, le public devrait démontrer sa confiance docile envers les autorités et experts attitrés, fermant les oreilles à toute voix discordante. La deuxième vision insiste sur la nécessité de maintenir la liberté de la recherche et la pratique médicale en les protégeant d’ingérence politique et de conflits d’intérêts de plus en plus manifestes. Entre ses deux visions, il paraît que le choix serait avant tout une affaire de volonté.
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