Politique
L’avortement dans la Constitution, une diversion d’Emmanuel Macron
Emmanuel Macron a annoncé qu’il voulait « graver la liberté des femmes de recourir à l’interruption volontaire de grossesse » dans la Constitution. C’était au lendemain d’un voyage présidentiel chahuté en Afrique, et en plein mouvement social contre la réforme des retraites. Le président de la République a fait cette annonce depuis le Palais de Justice, lors de l’hommage national rendu le 8 mars, Journée internationale des femmes, à Gisèle Halimi, égérie féministe mais aussi active alliée du FLN combattant la France pendant la guerre d’Algérie. Emmanuel Macron reprend ainsi une proposition de loi déposée en juillet dernier par Mathilde Panot, députée de La France Insoumise, dont le texte a été ensuite amendé mais, du coup, validé par le Sénat avant de revenir en deuxième lecture à l’Assemblée nationale (cf. LSDJ n°1816). Reprise par l’exécutif, la proposition de loi deviendra donc un projet de loi qui sera préparé « dans les prochains mois », a ajouté le chef de l’État.
La proposition de loi LFI se voulait une réplique à la décision de la Cour suprême américaine de laisser aux États fédérés la liberté de légiférer sur l’avortement (annulation de l'arrêt Roe v. Wade, 24 juin 2022). Une réplique symbolique puisqu’aucun parti politique français ne remet en cause la loi Veil dont la portée, au demeurant, n’a cessé d’être élargie. Neuf mois après la décision américaine, le président de la République française entend donc donner des gages à la gauche par un choix sociétal symbolique pour, a-t-il dit, contrer les « idéologies réactionnaires ». Sur ce terrain, la droite française a pris le pli de suivre la gauche par crainte d’être « ringardisée » (sa hantise !). Le scénario s’est encore vérifié avec l’amendement porté à la proposition de loi LFI le 1er février par le sénateur LR Philippe Bas, ancien collaborateur de Simone Veil. Son amendement a certes corrigé le « droit » à l’avortement en « liberté » d’avorter – formule reprise par Emmanuel Macron –, ce qui pourrait préserver l’objection de conscience des médecins. Reste que cet amendement ouvre la porte à l’entrée de l’avortement dans la Constitution française, comme Emmanuel Macron ne s’est pas privé de le souligner en saluant « les avancées issues des débats parlementaires, à l’initiative de l’Assemblée nationale puis éclairées par le Sénat. »
Une constitution est comme l’âme d’une communauté nationale. Son rôle est de définir les principes fondamentaux d’une nation et l’organisation des pouvoirs publics qui en procède, pas de consacrer des libertés ou des licences individuelles. Sur cette lancée, pourquoi ne pas inscrire dans la Constitution la liberté de changer de genre comme le voudrait Jean-Luc Mélenchon ? objecte Vincent Trémolet de Villers dans son éditorial d’Europe 1 (9 mars, vidéo en lien ci-dessous). L’éditorialiste remarque d’ailleurs que le Conseil constitutionnel considère déjà que la liberté d’interrompre une grossesse est une composante de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. C’est donc bien une diversion sociétale symbolique qui est recherchée par le président de la République : il agite une menace sur l’IVG pour qu’il soit moins question de l’inflation, du pouvoir d’achat, des retraites, du déclassement, de la crise de l’hôpital, du naufrage de l’Éducation nationale, ou de l’insécurité... Après l’avortement, ce sera l’euthanasie : sur le commencement comme sur la fin de la vie, l’opinion publique a été préparée de longue date à ne pas s’effaroucher de ce qui est pourtant une révolution anthropologique majeure...
Emmanuel Macron a indiqué le procédé qu’il allait utiliser : inscrire la liberté de recourir à l’avortement dans un projet de loi de révision constitutionnelle. Le président évitera ainsi de consulter les Français via un référendum coûteux et risqué, du moins s’agissant du taux de participation sinon de la réponse (encore qu’un référendum puisse être l’occasion de désavouer le questionneur quelle que soit la question). Tandis qu’avec le Congrès, sur le sujet totalement tabou de l’IVG, il devrait obtenir aisément un accord des deux tiers des parlementaires, députés et sénateurs. Cette convocation du Congrès sera-t-elle dédiée uniquement au sujet de l’IVG ? Pour que la ficelle ne paraisse pas trop grosse, d’autres sujets pourraient être insérés dans le projet de loi de révision constitutionnelle, par exemple la durée du mandat présidentiel, ou encore les statuts de la Corse ou de la Nouvelle Calédonie. Autant de sujets sur lesquels il serait plus facile d’obtenir une majorité parlementaire que sur la réforme des retraites ou sur l’immigration.
La proposition de loi LFI se voulait une réplique à la décision de la Cour suprême américaine de laisser aux États fédérés la liberté de légiférer sur l’avortement (annulation de l'arrêt Roe v. Wade, 24 juin 2022). Une réplique symbolique puisqu’aucun parti politique français ne remet en cause la loi Veil dont la portée, au demeurant, n’a cessé d’être élargie. Neuf mois après la décision américaine, le président de la République française entend donc donner des gages à la gauche par un choix sociétal symbolique pour, a-t-il dit, contrer les « idéologies réactionnaires ». Sur ce terrain, la droite française a pris le pli de suivre la gauche par crainte d’être « ringardisée » (sa hantise !). Le scénario s’est encore vérifié avec l’amendement porté à la proposition de loi LFI le 1er février par le sénateur LR Philippe Bas, ancien collaborateur de Simone Veil. Son amendement a certes corrigé le « droit » à l’avortement en « liberté » d’avorter – formule reprise par Emmanuel Macron –, ce qui pourrait préserver l’objection de conscience des médecins. Reste que cet amendement ouvre la porte à l’entrée de l’avortement dans la Constitution française, comme Emmanuel Macron ne s’est pas privé de le souligner en saluant « les avancées issues des débats parlementaires, à l’initiative de l’Assemblée nationale puis éclairées par le Sénat. »
Une constitution est comme l’âme d’une communauté nationale. Son rôle est de définir les principes fondamentaux d’une nation et l’organisation des pouvoirs publics qui en procède, pas de consacrer des libertés ou des licences individuelles. Sur cette lancée, pourquoi ne pas inscrire dans la Constitution la liberté de changer de genre comme le voudrait Jean-Luc Mélenchon ? objecte Vincent Trémolet de Villers dans son éditorial d’Europe 1 (9 mars, vidéo en lien ci-dessous). L’éditorialiste remarque d’ailleurs que le Conseil constitutionnel considère déjà que la liberté d’interrompre une grossesse est une composante de l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. C’est donc bien une diversion sociétale symbolique qui est recherchée par le président de la République : il agite une menace sur l’IVG pour qu’il soit moins question de l’inflation, du pouvoir d’achat, des retraites, du déclassement, de la crise de l’hôpital, du naufrage de l’Éducation nationale, ou de l’insécurité... Après l’avortement, ce sera l’euthanasie : sur le commencement comme sur la fin de la vie, l’opinion publique a été préparée de longue date à ne pas s’effaroucher de ce qui est pourtant une révolution anthropologique majeure...
Emmanuel Macron a indiqué le procédé qu’il allait utiliser : inscrire la liberté de recourir à l’avortement dans un projet de loi de révision constitutionnelle. Le président évitera ainsi de consulter les Français via un référendum coûteux et risqué, du moins s’agissant du taux de participation sinon de la réponse (encore qu’un référendum puisse être l’occasion de désavouer le questionneur quelle que soit la question). Tandis qu’avec le Congrès, sur le sujet totalement tabou de l’IVG, il devrait obtenir aisément un accord des deux tiers des parlementaires, députés et sénateurs. Cette convocation du Congrès sera-t-elle dédiée uniquement au sujet de l’IVG ? Pour que la ficelle ne paraisse pas trop grosse, d’autres sujets pourraient être insérés dans le projet de loi de révision constitutionnelle, par exemple la durée du mandat présidentiel, ou encore les statuts de la Corse ou de la Nouvelle Calédonie. Autant de sujets sur lesquels il serait plus facile d’obtenir une majorité parlementaire que sur la réforme des retraites ou sur l’immigration.