
La révolution numérique doit être humanisée
A l’école d’Aristote, on s’interroge d’abord sur le sens des mots. Plutôt que de parler d’emblée de « révolution » - bien que le mot ne soit pas trop fort-, on évoque souvent la « transformation digitale » : cette expression, selon Wikipédia, est un abus de langage, une « extension erronée de digital display …à toute numérisation. » Il serait plus juste techniquement de parler de « transformation numérique ».
Cependant, d’un point de vue philosophique, Pierre d’Elbée préfère l’expression « transformation digitale » : en effet, « le doigt exprime bien mieux le pouvoir qu’a l’être humain de piloter à travers un simple écran, son environnement » explique-t-il, en s’appuyant sur de nombreux exemples de notre utilisation quotidienne de nos smartphones, pour les loisirs ou la vie professionnelle.
L’expérience le montre : c’est bien une « révolution radicale » qui s’opère à travers cet outil : « la transformation digitale induit un bouleversement de notre rapport au monde : ce qui est en jeu n’est pas seulement la technique, mais le rapport simplifié entre une demande et sa réponse. » Mais n’allons pas parler pour autant de «révolution anthropologique », avertit Pierre d’Elbée : il s’agit d’ une « révolution technologique et culturelle, et c’est déjà pas mal ! »
Cette révolution n’est pas ou ne devrait pas être violente comme le suggère l’anglais « disruption ». Elle devrait au contraire s’inscrire dans les « révolutions douces » établies par le philosophe Michel Serres (écriture, imprimerie) puisque la digitalisation ouvre l’accès à l’information, à la connaissance et à une multitude d’actions pratiques.
Mais au bout du compte (et c’est là que s’opposent frontalement la « disruption » et la « révolution douce »), la transformation digitale est et doit rester un instrument au service de l’homme : c’est à lui qu’il revient toujours d’interpréter les faits, de décrypter l’information, d’exercer son sens critique, d’agir en connaissance de cause. Bref, « la transformation digitale n’est pas un but, mais un outil qu’il nous appartient d’humaniser.»