
La France vit-elle en démocrature ?
Mais la question est : la France est-elle réellement une « dictature » ? Si les violences policières et syndicales nous donnent des airs de Venezuela, on ne peut, comme le fait le président, prendre des régimes de ce type comme référence. Ce serait ne pas tenir compte des formes beaucoup plus modernes de domination. Les Français ne cherchent pas à fuir leur pays mais à y rester. Emmanuel Macron ajouta que « toutes les démocraties occidentales vivent une crise (…) qui s'exacerbe devant les grandes peurs contemporaines », citant les transformations numérique et climatique. Et si la peur était le premier marqueur de la dictature ? Or, sur ce terrain, nos émotions sont enchaînées au « fear marketing » et au « terror media ». Comme l’écrit le blog fondé par Joël de Rosnay (Agoravox), « chaque évènement donne lieu à une amplification démesurée des craintes individuelles et collectives. Peu à peu, le rêve et la confiance dans l’avenir (…) font place au repli sur soi, à la méfiance, à la suspicion, au communautarisme ». On assiste à « l’émergence d’une nouvelle forme de relation entre (…) les consommateurs et le commerce, (…) l’opinion publique et la presse, et finalement entre les citoyens et l’État. Une relation fondée sur le principe de précaution, l’angoisse, l’anxiété et la peur ». Vu sous cet angle, l’écologisme, même animé de bonnes intentions, manipule nos esprits pour les dominer.
De son côté, l’écrivain Aldous Huxley pointa « la dictature parfaite (…) qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s'évader. Un système d'esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur servitude ». Autrement dit, les institutions ne disent pas grand-chose du degré de liberté d’une société, ce qui nuance l'argument macronien. Le second marqueur tient dans notre relation au divertissement, à cette vie dont l’horizon se limite à l’hypermarché, au stade et au dance floor. Personne n’est obligé de regarder la télévision trois heures par jour. Or, celle-ci nous contrôle par ce qu’elle nous montre.
Un troisième marqueur est propre à la France : l’héritage monarchique et la lutte des classes. Réaction lue sur un blog : « La France est un genre d’oligarchie autoritaire octroyant des élections menant à la répétition du même Ordre (…) voué aux possédants et dominé par des lobbies (…), doublé d’une machine bureaucratique autoritaire et centralisée. » Le lexique est caricatural mais dit assez bien ce qui distingue notre pays : une sorte de démocrature, imperméable à tout ce qui ne ressemble pas à l’élitisme parisien achetant le peuple en lui distribuant les faveurs de l'État-providence. L’intronisation macronienne devant la Pyramide du Louvre offrit l’image de cette arrogance-là comme un lever de rideau…de fer ?