Politique
La France vit-elle en démocrature ?
Quel est le point commun entre Jacques Chirac et le pape ? Réponse : en moins de 48 heures, Emmanuel Macron réussit la prouesse de les « copier » ! Le premier, c’était dans la vieille ville de Jérusalem : le président français s’en prit à un policier israélien à la basilique Sainte-Anne, territoire français. L’incident était-il calculé ? Les media l’associèrent à l’altercation de 1996 qui valut à Jacques Chirac un regain de notoriété auprès des sympathisants palestiniens en France. Le second, c’était dans l’avion qui le ramenait d’Israël hier soir. Au micro de Radio J, Emmanuel Macron lâcha un tapis de bombes sur des discours politiques « extraordinairement coupables » qui accréditeraient « l’idée que nous ne serions plus dans une démocratie, qu'une forme de dictature se serait installée ». Le chef de l’État se fendit d’une tirade puissante : « Mais allez en dictature ! Une dictature, c'est un régime ou une personne ou un clan décident des lois. Une dictature, c'est un régime où on ne change pas les dirigeants, jamais. Si la France c'est cela, essayez la dictature et vous verrez ! La dictature, elle justifie la haine. La dictature, elle justifie la violence pour en sortir. Mais il y a en démocratie un principe fondamental: le respect de l'autre, l'interdiction de la violence, la haine à combattre ». Qui l’attaque macronienne visait-elle ? Pour Sibeth Ndiaye, il n'était pas question de « jeter l'anathème sur untel ou untel », même si le porte-parole du gouvernement se plut à rapporter avoir entendu elle-même « un responsable syndical de SUD qui justifiait une forme de violence dans les manifestations » ou « des responsables locaux de la CGT ». Au-delà des actions coups de poing, la réplique s’adressait à Jean-Luc Mélenchon qui s’empressa de renverser les choses ce matin en affirmant qu’Emmanuel Macron « est le seul responsable de toute la violence », tandis que Ségolène Royal, tout juste révoquée de ses fonctions d'ambassadrice des pôles, qualifiait le pouvoir de « régime autoritaire ». « La violence est du côté du pouvoir et pas du côté des manifestants ou des grévistes », estima le dirigeant de La France insoumise. On peut se quereller à l’envi sur les responsabilités partagées.
Mais la question est : la France est-elle réellement une « dictature » ? Si les violences policières et syndicales nous donnent des airs de Venezuela, on ne peut, comme le fait le président, prendre des régimes de ce type comme référence. Ce serait ne pas tenir compte des formes beaucoup plus modernes de domination. Les Français ne cherchent pas à fuir leur pays mais à y rester. Emmanuel Macron ajouta que « toutes les démocraties occidentales vivent une crise (…) qui s'exacerbe devant les grandes peurs contemporaines », citant les transformations numérique et climatique. Et si la peur était le premier marqueur de la dictature ? Or, sur ce terrain, nos émotions sont enchaînées au « fear marketing » et au « terror media ». Comme l’écrit le blog fondé par Joël de Rosnay (Agoravox), « chaque évènement donne lieu à une amplification démesurée des craintes individuelles et collectives. Peu à peu, le rêve et la confiance dans l’avenir (…) font place au repli sur soi, à la méfiance, à la suspicion, au communautarisme ». On assiste à « l’émergence d’une nouvelle forme de relation entre (…) les consommateurs et le commerce, (…) l’opinion publique et la presse, et finalement entre les citoyens et l’État. Une relation fondée sur le principe de précaution, l’angoisse, l’anxiété et la peur ». Vu sous cet angle, l’écologisme, même animé de bonnes intentions, manipule nos esprits pour les dominer.
De son côté, l’écrivain Aldous Huxley pointa « la dictature parfaite (…) qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s'évader. Un système d'esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur servitude ». Autrement dit, les institutions ne disent pas grand-chose du degré de liberté d’une société, ce qui nuance l'argument macronien. Le second marqueur tient dans notre relation au divertissement, à cette vie dont l’horizon se limite à l’hypermarché, au stade et au dance floor. Personne n’est obligé de regarder la télévision trois heures par jour. Or, celle-ci nous contrôle par ce qu’elle nous montre.
Un troisième marqueur est propre à la France : l’héritage monarchique et la lutte des classes. Réaction lue sur un blog : « La France est un genre d’oligarchie autoritaire octroyant des élections menant à la répétition du même Ordre (…) voué aux possédants et dominé par des lobbies (…), doublé d’une machine bureaucratique autoritaire et centralisée. » Le lexique est caricatural mais dit assez bien ce qui distingue notre pays : une sorte de démocrature, imperméable à tout ce qui ne ressemble pas à l’élitisme parisien achetant le peuple en lui distribuant les faveurs de l'État-providence. L’intronisation macronienne devant la Pyramide du Louvre offrit l’image de cette arrogance-là comme un lever de rideau…de fer ?
Mais la question est : la France est-elle réellement une « dictature » ? Si les violences policières et syndicales nous donnent des airs de Venezuela, on ne peut, comme le fait le président, prendre des régimes de ce type comme référence. Ce serait ne pas tenir compte des formes beaucoup plus modernes de domination. Les Français ne cherchent pas à fuir leur pays mais à y rester. Emmanuel Macron ajouta que « toutes les démocraties occidentales vivent une crise (…) qui s'exacerbe devant les grandes peurs contemporaines », citant les transformations numérique et climatique. Et si la peur était le premier marqueur de la dictature ? Or, sur ce terrain, nos émotions sont enchaînées au « fear marketing » et au « terror media ». Comme l’écrit le blog fondé par Joël de Rosnay (Agoravox), « chaque évènement donne lieu à une amplification démesurée des craintes individuelles et collectives. Peu à peu, le rêve et la confiance dans l’avenir (…) font place au repli sur soi, à la méfiance, à la suspicion, au communautarisme ». On assiste à « l’émergence d’une nouvelle forme de relation entre (…) les consommateurs et le commerce, (…) l’opinion publique et la presse, et finalement entre les citoyens et l’État. Une relation fondée sur le principe de précaution, l’angoisse, l’anxiété et la peur ». Vu sous cet angle, l’écologisme, même animé de bonnes intentions, manipule nos esprits pour les dominer.
De son côté, l’écrivain Aldous Huxley pointa « la dictature parfaite (…) qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s'évader. Un système d'esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur servitude ». Autrement dit, les institutions ne disent pas grand-chose du degré de liberté d’une société, ce qui nuance l'argument macronien. Le second marqueur tient dans notre relation au divertissement, à cette vie dont l’horizon se limite à l’hypermarché, au stade et au dance floor. Personne n’est obligé de regarder la télévision trois heures par jour. Or, celle-ci nous contrôle par ce qu’elle nous montre.
Un troisième marqueur est propre à la France : l’héritage monarchique et la lutte des classes. Réaction lue sur un blog : « La France est un genre d’oligarchie autoritaire octroyant des élections menant à la répétition du même Ordre (…) voué aux possédants et dominé par des lobbies (…), doublé d’une machine bureaucratique autoritaire et centralisée. » Le lexique est caricatural mais dit assez bien ce qui distingue notre pays : une sorte de démocrature, imperméable à tout ce qui ne ressemble pas à l’élitisme parisien achetant le peuple en lui distribuant les faveurs de l'État-providence. L’intronisation macronienne devant la Pyramide du Louvre offrit l’image de cette arrogance-là comme un lever de rideau…de fer ?