International
La Centrafrique préfère Wagner
Précédant le Mali, la République centrafricaine (RCA) est sur le point de « virer » la France. Les responsables politiques locaux et les réseaux sociaux multiplient les déclarations enflammées contre le partenaire historique, alors que le groupe Wagner, entreprise russe de mercenariat, est invité par les dirigeants centrafricains et maliens à prendre le relai pour contrer plus efficacement les multiples groupes terroristes et mafieux qui sévissent sur leur territoire depuis des années.
Comment a-t-on pu en arriver là ?
La guerre civile qui ravage la RCA est indissociable de la tragique histoire de ce pays faisant jonction entre la savane désertique et la forêt. Depuis la fin du 17ème siècle, les différents flux de populations (musulmans, animistes et chrétiens) ont engendré de nombreux conflits, mis temporairement sous boisseau par la colonisation française. Le territoire demeurait pourtant instable, une grande partie de ses espaces (plus de 620 000 km²) restant incontrôlée. Depuis l’indépendance, acquise de haute lutte, en 1960, par son mythique fondateur Barthélémy Boganda, la Centrafrique, qui dispose de gigantesques ressources naturelles attirant les convoitises (or, diamants, bauxite, manganèse, uranium, bois…) a renoué avec l'instabilité pour sombrer, en 2013, dans une guerre civile qui rend de facto impossible le développement du pays. À ce jour, le conflit a engendré un véritable drame humanitaire, faisant plus de 600 000 réfugiés.
D’un point de vue géostratégique et géopolitique, il paraît impossible de stabiliser la RCA sans l’intervention directe d’un grand pays, tel la France ou un autre, et l’appui de certains états de la sous-région comme le Tchad. N’Djamena disposait en théorie de moyens de coercition et de contrôle sur des groupes armés djihadistes, mais il faisait très peu, même avant la disparition brutale du président Idriss Deby. L’État français n’a pas non plus voulu intervenir rapidement et directement dans le bourbier centrafricain, considérant le Tchad comme « un bon allié » dans le dispositif « Serval » qui compte un important contingent de soldats tchadiens envoyés au Mali aider les français.
Après l’adoption en décembre 2013 de la résolution 2127 du Conseil de sécurité des Nations Unies, la France a cependant envoyé 1200 soldats pour rétablir la sécurité dans le pays (opération Sangaris). Ensuite, le Conseil a décidé la mise en place de la MINUSCA (plus de 10 000 hommes à ce jour) pour stabiliser la situation. L'intervention des troupes françaises et africaines en 2013 a sauvé la RCA d'un conflit civil majeur et potentiellement génocidaire et créé les conditions pour les élections générales qui ont porté M. Touadéra au pouvoir en 2016, sous l’égide de la communauté internationale. Mais cela seulement sur une petite partie du territoire, 80% étant restés aux mains des groupes armés islamiques et autres. C’est ainsi que, pendant des années, cette situation terrible de partition de fait perdurait... et personne ne semblait s’en soucier ! Voilà pourquoi la RCA, excédée, a finalement décidé de s'appuyer sur l'expertise militaire russe et a été conduite, en contrepartie de ce soutien, à signer des accords miniers avec la Russie.
Accusée d'ingérence et d’impuissance pour restaurer l’unité de la RCA, la France apparaît désormais comme une puissance d’occupation. La Russie a pris la place, via le groupe paramilitaire Wagner, jugé plus prompt à en découdre et plus décidé. Résultat : une reconquête spectaculaire du pays avec moins de 1500 hommes appuyés par les Forces armées centrafricaines (FACA) en pleine reconstitution. Ces mêmes FACA formées par l’UE et la France ! Les méthodes brutales de Wagner génèrent des inquiétudes et la communauté internationale a condamné l’expédition punitive menée la nuit du 13 novembre dans la ville de Bria, au cours de laquelle de nombreux civils ont été massacrés. Mais la situation de la Centrafrique apparaît bien meilleure aujourd’hui qu’il y a quelques mois. Et on doit constater que ce n’est pas grâce à la France !
En réaction à cette évolution qui le marginalise, Emmanuel Macron a suspendu le soutien budgétaire au gouvernement de la RCA. Il a assorti cette mesure d’un avertissement public lors d’une interview donnée le 30 mai 2021 au Journal du Dimanche. Ses paroles crues ont été perçues comme arrogantes. Et elles n’ont pas dissuadé le gouvernement de M. Touadéra de confirmer son arrangement avec le ministère de la défense russe.
Il est clair qu’au travers de tous ces événements, l’influence française en Afrique décroit très rapidement. À la demande des régimes en difficulté, la France, accusée d’inefficacité, se trouve remplacée par d'autres puissances comme la Russie ou la Chine. En Centrafrique, sa présence militaire s’est réduite comme peau de chagrin à 300 hommes. Le Mali et le Tchad seront sans doute les prochaines remises en cause. La France devrait y réfléchir. Compte tenu de son histoire, on peut parler d'un immense gâchis. À deux mois de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron aura clairement du mal à vanter la réussite de sa politique africaine !…
Comment a-t-on pu en arriver là ?
La guerre civile qui ravage la RCA est indissociable de la tragique histoire de ce pays faisant jonction entre la savane désertique et la forêt. Depuis la fin du 17ème siècle, les différents flux de populations (musulmans, animistes et chrétiens) ont engendré de nombreux conflits, mis temporairement sous boisseau par la colonisation française. Le territoire demeurait pourtant instable, une grande partie de ses espaces (plus de 620 000 km²) restant incontrôlée. Depuis l’indépendance, acquise de haute lutte, en 1960, par son mythique fondateur Barthélémy Boganda, la Centrafrique, qui dispose de gigantesques ressources naturelles attirant les convoitises (or, diamants, bauxite, manganèse, uranium, bois…) a renoué avec l'instabilité pour sombrer, en 2013, dans une guerre civile qui rend de facto impossible le développement du pays. À ce jour, le conflit a engendré un véritable drame humanitaire, faisant plus de 600 000 réfugiés.
D’un point de vue géostratégique et géopolitique, il paraît impossible de stabiliser la RCA sans l’intervention directe d’un grand pays, tel la France ou un autre, et l’appui de certains états de la sous-région comme le Tchad. N’Djamena disposait en théorie de moyens de coercition et de contrôle sur des groupes armés djihadistes, mais il faisait très peu, même avant la disparition brutale du président Idriss Deby. L’État français n’a pas non plus voulu intervenir rapidement et directement dans le bourbier centrafricain, considérant le Tchad comme « un bon allié » dans le dispositif « Serval » qui compte un important contingent de soldats tchadiens envoyés au Mali aider les français.
Après l’adoption en décembre 2013 de la résolution 2127 du Conseil de sécurité des Nations Unies, la France a cependant envoyé 1200 soldats pour rétablir la sécurité dans le pays (opération Sangaris). Ensuite, le Conseil a décidé la mise en place de la MINUSCA (plus de 10 000 hommes à ce jour) pour stabiliser la situation. L'intervention des troupes françaises et africaines en 2013 a sauvé la RCA d'un conflit civil majeur et potentiellement génocidaire et créé les conditions pour les élections générales qui ont porté M. Touadéra au pouvoir en 2016, sous l’égide de la communauté internationale. Mais cela seulement sur une petite partie du territoire, 80% étant restés aux mains des groupes armés islamiques et autres. C’est ainsi que, pendant des années, cette situation terrible de partition de fait perdurait... et personne ne semblait s’en soucier ! Voilà pourquoi la RCA, excédée, a finalement décidé de s'appuyer sur l'expertise militaire russe et a été conduite, en contrepartie de ce soutien, à signer des accords miniers avec la Russie.
Accusée d'ingérence et d’impuissance pour restaurer l’unité de la RCA, la France apparaît désormais comme une puissance d’occupation. La Russie a pris la place, via le groupe paramilitaire Wagner, jugé plus prompt à en découdre et plus décidé. Résultat : une reconquête spectaculaire du pays avec moins de 1500 hommes appuyés par les Forces armées centrafricaines (FACA) en pleine reconstitution. Ces mêmes FACA formées par l’UE et la France ! Les méthodes brutales de Wagner génèrent des inquiétudes et la communauté internationale a condamné l’expédition punitive menée la nuit du 13 novembre dans la ville de Bria, au cours de laquelle de nombreux civils ont été massacrés. Mais la situation de la Centrafrique apparaît bien meilleure aujourd’hui qu’il y a quelques mois. Et on doit constater que ce n’est pas grâce à la France !
En réaction à cette évolution qui le marginalise, Emmanuel Macron a suspendu le soutien budgétaire au gouvernement de la RCA. Il a assorti cette mesure d’un avertissement public lors d’une interview donnée le 30 mai 2021 au Journal du Dimanche. Ses paroles crues ont été perçues comme arrogantes. Et elles n’ont pas dissuadé le gouvernement de M. Touadéra de confirmer son arrangement avec le ministère de la défense russe.
Il est clair qu’au travers de tous ces événements, l’influence française en Afrique décroit très rapidement. À la demande des régimes en difficulté, la France, accusée d’inefficacité, se trouve remplacée par d'autres puissances comme la Russie ou la Chine. En Centrafrique, sa présence militaire s’est réduite comme peau de chagrin à 300 hommes. Le Mali et le Tchad seront sans doute les prochaines remises en cause. La France devrait y réfléchir. Compte tenu de son histoire, on peut parler d'un immense gâchis. À deux mois de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron aura clairement du mal à vanter la réussite de sa politique africaine !…
La sélection
En Afrique, Wagner chasse la France
Aleteia