Les Français majoritairement insatisfaits du remaniement et du discours présidentiel
Selon un sondage Odoxa-Backbone Consulting pour Le Figaro, 61 % des Français se disent insatisfaits du remaniement annoncé le 20 juillet. « Il s'agit là du plus haut niveau d'opinions négatives à l'égard d'un gouvernement jamais mesuré par l'institut depuis la première élection d'Emmanuel Macron, en 2017, commente Le Figaro. Et pour cause, 62 % des sondés auraient souhaité que […] la première ministre soit remplacée. Les trois quarts des sondés (74 %) en déduisent donc que le tout nouveau gouvernement mènera exactement la même politique que le précédent ». Même déception après l'interview du Président depuis Nouméa le 24 juillet : « 70 % des Français qui ont suivi l'intervention du président ne l'ont pas trouvé "convaincant" [...] selon une étude "flash" Harris interactive-Toluna pour LCI. 44 % l'ont même trouvé "pas du tout convaincant" » résume TF1. À commencer donc pour cette affirmation que le maintien d'Elisabeth Borne était « le choix de la confiance, de la continuité et de l'efficacité. »
En fait, ce fut un mini-remaniement, effectué presque en catimini après des hésitations qui en ont retardé l'annonce. À part la nomination d'Aurélien Rousseau, qui de directeur de cabinet d'Élisabeth Borne devient ministre de la Santé, et celle de Gabriel Attal à l'Éducation nationale, aucune nomination ne retient l'attention. Le premier remplace un médecin dont le seul mais méritoire « fait d'arme » aura été de ne pas cacher ses réticences envers l'euthanasie (ne serait-ce pas ce qui lui a valu d'être remercié ?). Le second sera probablement accueilli avec soulagement après l'année gaspillée sous la houlette calamiteuse de Pap Ndiaye. Espérons toutefois qu'il se concentrera sur l'apprentissage des fondamentaux (lire, écrire, compter) et s'abstiendra d'infliger aux élèves les catéchismes wokiste et LGBT.
Sinon, rien, ou presque. Un morne jeu de chaises musicales au terme des « cent jours ». Ni rassemblement comme l'avait promis Emmanuel Macron en 2017, ni renouvellement comme il l'avait fait miroiter pour sa réélection en 2022. De simples « ajustements ». Rien pour insuffler un peu d'enthousiasme aux Français assommés par les émeutes, l'inflation, la dette, le naufrage de l'école, et tétanisés par le grand déclassement et le grand remplacement… Dernier signe d'un pouvoir à la dérive, la justice et la police s'affrontent au grand jour jusqu'au sommet de leurs hiérarchies respectives, à propos de l'incarcération d'un policier accusé de violences gratuites à Marseille.
Après les crises que la France a connues depuis plus de deux ans, couronnées par des émeutes urbaines d'une violence sans précédent, on pouvait espérer que le président de la République annoncerait des mesures fortes, des chantiers de grande ampleur, loin du « en même temps » dans lequel le premier quinquennat et le début du second se sont encalminés. Mais l'allocution présidentielle n'aura pas effacé dans l'opinion l'impression de décalage entre le sentiment d'urgence que ressentent les Français et les promesses d'Emmanuel Macron. Avec une sorte de fatalisme, le Président a reconnu qu'il y avait eu des « jours avec » et des « jours sans ». Mais à l'avenir, concrètement ? Y aura-t-il, par exemple, un « professeur devant chaque classe » à la rentrée, comme il l'a assuré ? Suffit-il pour rétablir la paix de marteler que l'objectif premier de l'exécutif sera désormais « l'ordre, l'ordre, l'ordre » ou de plaider pour un « retour à l'autorité parentale », une expression qui semblait pourtant vouée à l'obsolescence programmée dans le logiciel progressiste du gouvernement ? S'agissant enfin des « quartiers », qui peut croire sérieusement que c'est en revoyant « la politique de répartition des difficultés », autrement dit en dispersant au maximum les nouveaux arrivants dans toute la France, contrairement aux vœux des habitants, qu'on obtiendra un retour au calme chez des jeunes majoritairement issus de l'immigration ? L'Éducation nationale leur a-t-elle enseigné, à eux comme à l'ensemble des élèves, le respect et l'amour de la France ? Quant à la promesse présidentielle d'un projet de loi relatif à l'immigration à bâtir avec les « oppositions républicaines » (dont on attend la définition), elle ressemble à de nouvelles « paroles verbales » …
Un an après l'épisode calamiteux du Stade de France, et à un an du coup d'envoi des Jeux Olympiques (le compte à rebours a commencé ce 26 juillet), on ne peut que redouter cette échéance. La France ressemble à un navire privé de moyen de propulsion après avoir essuyé une tempête, et qui continue sur sa lancée vers on ne sait quel cap… le seul visible à l'horizon étant la redoutable digue de la dette. Voilà la France « réduite aux aguets », se désole dans Causeur (en lien ci-dessous) Philippe Bilger, magistrat honoraire, président de l'Institut de la parole, chroniqueur à CNews et à Sud Radio.