Économie

La Fondation Ford : des milliards pour le progressisme

Par Ludovic Lavaucelle - Publié le 05/07/2024 - Illustration : Shutterstock
La Fondation Ford compte parmi les 5 ONG les plus riches du monde. Née en 1936 pour aider la famille Ford à échapper aux lourds impôts de succession, elle est devenue après la mort de son fondateur une entité indépendante. Elle est à la pointe du progressisme. La Fondation Ford agit dans l'ombre des puissants depuis la promotion des droits civiques jusqu'au communautarisme aujourd'hui.

En novembre 2023, au lendemain des attaques terroristes perpétrées par le Hamas, des manifestants ont marché dans les rues de New York au cri de : "From the river to the sea, Palestine shall be free". À la tête des activistes se trouvait Linda Sarsour. Cette Américano-Palestinienne dirige l'ONG MPower Change dont l'objet est de pousser les intérêts islamiques aux États-Unis. Celle qui appelait à dénoncer le « complot juif » est payée pour cela… Son ONG a reçu $ 300 000 de la Fondation Ford. De nombreux exemples montrent l'engagement de cette richissime organisation auprès de groupes radicaux. 35,2 millions de dollars ont été versés depuis 2012 au Center for Popular Democracy — dont des militants d'extrême-gauche ont été condamnés pour avoir envahi le Capitole en mai 2023. Les écologistes radicaux ne sont pas oubliés :  $ 650 000 de financement pour la « formation » de The Sunrise Movement dont des activistes ont aussi été arrêtés pour une irruption au Capitole. La Fondation Ford ne limite pas sa générosité aux révolutionnaires sur son sol : la China Development Research Foundation (CDRF), un think-tank dépendant de Pékin, a reçu $ 600 000 pour l'aider à développer une version chinoise du « développement durable ».

Tous ces sommes sont de petites fractions par rapport au presque milliard de dollars que la Fondation verse chaque année. Assise sur une montagne atteignant 16,4 milliards de dollars en 2022, la Fondation Ford entend promouvoir sa « vision pour la justice sociale » et figure parmi les cinq principales organisations philanthropiques américaines. Elle occupe donc un rôle politique de premier plan selon N.S Lyons (voir l'article en sélection) qui influence le fonctionnement de la première démocratie mondiale. La Fondation Ford sera bientôt centenaire et sa mission était annoncée dès le début des années 50 : éradiquer la souffrance à travers le monde en soutenant les mouvements progressistes. Darren Walker, à la tête de la Fondation depuis 2013, a imposé une priorité très politique : « casser les ressorts de l'inégalité à travers le monde ». En 2020-2021, trois milliards de dollars ont été alloués pour soutenir les mouvements racialistes états-uniens – un record ! Les « antifa » ont aussi bénéficié des dons de la Fondation visant à payer leurs avocats après des actions violentes. En réalité, la politique de Darren Walker n'était pas un tournant, juste une affirmation de l'idéologie communautariste de la Fondation depuis des décennies. Dès les années 60, ses dirigeants ont ciblé les communautés hispanophones qui avaient le tort – à leurs yeux – de ne pas exister comme un groupe politique uni… Il fallait donner une conscience politique à tous ces Mexicains, Porto-Ricains et Cubains qui jusque-là ne se considéraient pas comme des "Hispanics" victimes du système oppressif américain. En 1970, le soutien aux « droits des minorités » allait concentrer 40 % du budget national de la Fondation.

La Fondation Ford a été très influente à Washington – surtout après l'arrivée de JFK à la Maison Blanche en 1960 et de son successeur Lyndon Johnson. Elle était au cœur de la politique pour les « droits civiques » et de la Welfare society. Elle a fait la part belle aux politiques de protection sociale, jusqu'à nommer ses cadres sur le terrain pour « guider » les communautés urbaines les plus défavorisées. Dans certains endroits, elle a été jusqu'à traverser la ligne rouge en appelant les plus radicaux à s'armer… Si l'on remonte, le très capitaliste Henry Ford a créé la Fondation Ford en 1936 comme un moyen d'échapper aux impôts de succession qui posaient un risque financier majeur à ses héritiers. À son décès en 1947, 90 % des actions Ford ont été léguées à la Fondation — permettant à la famille Ford de garder le contrôle de la holding. C'est le fils Henry Ford II qui a fait de la Fondation Ford une entité légale indépendante. Pendant la décennie 50, son activisme a ciblé les universités pour reconstruire une élite américaine à l'heure de la guerre froide. Dès le début, la défiance vis-à-vis de la volonté populaire était claire : « C'est un mythe grotesque de croire que les citoyens même raisonnables ont la capacité de prendre part à des décisions gouvernementales… » peut-lire dans les premiers rapports. La Fondation a sponsorisé la création d'une nouvelle discipline dans les grandes universités : la sociologie. Dans les années 70, ses grands esprits malthusiens ont dépêché des « experts » en Inde auprès d'Indira Gandhi pour soutenir la politique de stérilisation de masse de 10 millions de personnes appartenant aux castes « inférieures ».

La Fondation Ford entend depuis plus de 80 ans changer le monde. C'est un agent utile de l'empire américain pour maintenir son hégémonie sur des organisations supra-nationales comme l'ONU et l'OMS, tout en ne pouvant cacher sa fascination pour le régime totalitaire chinois.« J'ai fait des erreurs » a admis Henry Ford II en 1973. « La pire de toutes était d'abandonner le contrôle de la Fondation qui a été un fiasco depuis le début à cause de dirigeants qui n'ont de comptes à rendre à personne… »

La sélection
La Fondation de la folie américaine
Lire l'essai sur The City Journal
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