Écologie
Est-il raisonnable de s’enflammer autour d’une bassine ?
Les Français s’enflamment autour des bassines. La colère est amplifiée par le drame vécu par des manifestants sur place. De quoi s’agit-il ? Pour prendre du recul, posons quelques chiffres concernant le bassin de la Sèvre Niortaise où se situe la bassine de Sainte-Soline.
Une bassine a pour objet de pomper de l’eau dans la nappe phréatique pendant l’hiver pour permettre à des agriculteurs de la réutiliser pendant l’été. Or l’eau utilisée à des fins alimentaires pour produire végétaux et produits animaux est dix fois supérieure aux usages domestiques courants, boissons, toilette, lavages... Au-delà de la proportion entre les usages, quelles sont les ressources ? Concrètement, la bassine de Sainte-Soline entre dans le cadre d’un projet de 19 bassines dans le bassin versant de la Sèvre niortaise. L’objectif est le stockage de 8 à 9 millions de m3 (Mm3). Le chiffre parait considérable, mais la ressource pluviométrique moyenne de 822 mm/an sur les 3 350 km2 du bassin de la Sèvre Niortaise correspond à environ 2 750 Mm3. Le stockage ne représente donc que 3 pour 1000 de la pluviométrie annuelle. Le qualificatif de méga-bassine n’est donc pas justifié !
Certes, une partie de l’eau prélevée s’évapore dans les bassines. Mais, le rapport de suivi de l’enquête publique chiffre l’évaporation à « 3% ou 4% du volume total stocké ». Voilà donc 0,3 Mm3 apparemment perdus. Mais, le même rapport explique que l’évapotranspiration (ETP), celle du sol et des plantes, représente 57% de la ressource pluviale soit environ 1 650 Mm3 pour le bassin de la Sèvre ! 5 000 fois plus que toutes les bassines ! Paradoxalement une autre part considérable de l’eau disponible s’écoule par le fleuve. Le débit moyen de la Sèvre est de 11,9 m3/seconde. Voilà donc près de 400 Mm3 d’eau douce qui sont perdues en mer… On est loin de certains pays, qui gèrent l’eau avec l’objectif « zéro eau douce à la mer ». Faut-il parler de pénurie d’eau au regard de ces chiffres ? Les géographes aiment dire qu’il n’existe pas de problème d’eau, mais d’accès à l’eau. Il s’agit d’un problème économique plus qu’écologique. En tout état de cause, on ne peut pas non plus parler d’accaparement de l’eau par les agriculteurs : l’usage d’eau potable, sur ce bassin fluvial, n’est que de l’ordre de 19 Mm3 soit 1,5% de la pluie efficace, c’est-à-dire nette d’évaporation !
Dans ce contexte, est-il pertinent que l’état subventionne ces investissements ? Le coût du programme était estimé à 59 M€, et devait être amorti à l’horizon de 30 années après ! Cette question des subventions mérite d’être replacée dans un contexte mondial. L’UE a été contrainte de supprimer ses barrières douanières. Il s’agissait, en fait de subventions payées par le consommateur qui achetait des produits agricoles parfois au double du prix mondial qui ne reflète que des prix marginaux d’excédents agricoles, et en aucun cas ne permettent à des producteurs de couvrir leurs frais fixes. Le consommateur, aujourd’hui, en profite, hormis l’effet temporaire lié à la guerre en Ukraine. Tous les pays du monde sont donc conduits à subventionner indirectement leurs agriculteurs. Ici, avec des taux financiers bonifiés pour investir, ailleurs avec des systèmes d'assurances catastrophes naturelles ! Dans le cas présent des bassines. On reparle de souveraineté alimentaire et il faudrait veiller à ne pas rallumer les vieilles querelles entre les rats des champs et ceux des villes. Nous avons perdu notre souveraineté industrielle et informatique, notre souveraineté énergétique et pharmaceutique. Faut-il au nom d’un purisme libéral perdre progressivement notre souveraineté alimentaire ?
L’agriculture intensive est également dans le collimateur de cette guerre des nerfs. Pourtant, les coopératives maîtresses d’œuvre de ces projets sont ouvertes à tous, agriculteurs biologiques ou non. Ceux qui souhaitent les utiliser disposent d’un compteur et paient une redevance proportionnelle. Quant à dire que l’irrigation favorise l’usage de pesticides, ce pourrait bien être l’inverse. Avec la monoculture, les parasites et mauvaises herbes se développent et ne peuvent être éradiqués qu’à force de produits de pharmacie des plantes. Une retenue d’eau permet la diversification, l'allongement des rotations, la culture du pois protéagineux, du sorgho ou d’autres cultures qui ne sont rentables qu'avec irrigation.
L’enjeu est plus celui d’un accès à l’eau que celui du réchauffement climatique. Deux études, dénommées Climator et Explore-2070, ont analysé les scenarios du Giec et ont conclu que « selon le scénario A1B du GIEC, la quantité globale de pluie dans le bassin du Marais Poitevin ne devrait pas varier sensiblement à l’horizon de 50 ans ». Le Giec, lui non plus, n’établit pas de corrélation entre réchauffement climatique et sècheresse : « il y a une faible confiance concernant la tendance observée à l’échelle mondiale de la sècheresse depuis le milieu du 20e siècle », dit-il. La question des bassines se résume probablement à une simple question de gestion efficace de l’accès à l’eau.
Une bassine a pour objet de pomper de l’eau dans la nappe phréatique pendant l’hiver pour permettre à des agriculteurs de la réutiliser pendant l’été. Or l’eau utilisée à des fins alimentaires pour produire végétaux et produits animaux est dix fois supérieure aux usages domestiques courants, boissons, toilette, lavages... Au-delà de la proportion entre les usages, quelles sont les ressources ? Concrètement, la bassine de Sainte-Soline entre dans le cadre d’un projet de 19 bassines dans le bassin versant de la Sèvre niortaise. L’objectif est le stockage de 8 à 9 millions de m3 (Mm3). Le chiffre parait considérable, mais la ressource pluviométrique moyenne de 822 mm/an sur les 3 350 km2 du bassin de la Sèvre Niortaise correspond à environ 2 750 Mm3. Le stockage ne représente donc que 3 pour 1000 de la pluviométrie annuelle. Le qualificatif de méga-bassine n’est donc pas justifié !
Certes, une partie de l’eau prélevée s’évapore dans les bassines. Mais, le rapport de suivi de l’enquête publique chiffre l’évaporation à « 3% ou 4% du volume total stocké ». Voilà donc 0,3 Mm3 apparemment perdus. Mais, le même rapport explique que l’évapotranspiration (ETP), celle du sol et des plantes, représente 57% de la ressource pluviale soit environ 1 650 Mm3 pour le bassin de la Sèvre ! 5 000 fois plus que toutes les bassines ! Paradoxalement une autre part considérable de l’eau disponible s’écoule par le fleuve. Le débit moyen de la Sèvre est de 11,9 m3/seconde. Voilà donc près de 400 Mm3 d’eau douce qui sont perdues en mer… On est loin de certains pays, qui gèrent l’eau avec l’objectif « zéro eau douce à la mer ». Faut-il parler de pénurie d’eau au regard de ces chiffres ? Les géographes aiment dire qu’il n’existe pas de problème d’eau, mais d’accès à l’eau. Il s’agit d’un problème économique plus qu’écologique. En tout état de cause, on ne peut pas non plus parler d’accaparement de l’eau par les agriculteurs : l’usage d’eau potable, sur ce bassin fluvial, n’est que de l’ordre de 19 Mm3 soit 1,5% de la pluie efficace, c’est-à-dire nette d’évaporation !
Dans ce contexte, est-il pertinent que l’état subventionne ces investissements ? Le coût du programme était estimé à 59 M€, et devait être amorti à l’horizon de 30 années après ! Cette question des subventions mérite d’être replacée dans un contexte mondial. L’UE a été contrainte de supprimer ses barrières douanières. Il s’agissait, en fait de subventions payées par le consommateur qui achetait des produits agricoles parfois au double du prix mondial qui ne reflète que des prix marginaux d’excédents agricoles, et en aucun cas ne permettent à des producteurs de couvrir leurs frais fixes. Le consommateur, aujourd’hui, en profite, hormis l’effet temporaire lié à la guerre en Ukraine. Tous les pays du monde sont donc conduits à subventionner indirectement leurs agriculteurs. Ici, avec des taux financiers bonifiés pour investir, ailleurs avec des systèmes d'assurances catastrophes naturelles ! Dans le cas présent des bassines. On reparle de souveraineté alimentaire et il faudrait veiller à ne pas rallumer les vieilles querelles entre les rats des champs et ceux des villes. Nous avons perdu notre souveraineté industrielle et informatique, notre souveraineté énergétique et pharmaceutique. Faut-il au nom d’un purisme libéral perdre progressivement notre souveraineté alimentaire ?
L’agriculture intensive est également dans le collimateur de cette guerre des nerfs. Pourtant, les coopératives maîtresses d’œuvre de ces projets sont ouvertes à tous, agriculteurs biologiques ou non. Ceux qui souhaitent les utiliser disposent d’un compteur et paient une redevance proportionnelle. Quant à dire que l’irrigation favorise l’usage de pesticides, ce pourrait bien être l’inverse. Avec la monoculture, les parasites et mauvaises herbes se développent et ne peuvent être éradiqués qu’à force de produits de pharmacie des plantes. Une retenue d’eau permet la diversification, l'allongement des rotations, la culture du pois protéagineux, du sorgho ou d’autres cultures qui ne sont rentables qu'avec irrigation.
L’enjeu est plus celui d’un accès à l’eau que celui du réchauffement climatique. Deux études, dénommées Climator et Explore-2070, ont analysé les scenarios du Giec et ont conclu que « selon le scénario A1B du GIEC, la quantité globale de pluie dans le bassin du Marais Poitevin ne devrait pas varier sensiblement à l’horizon de 50 ans ». Le Giec, lui non plus, n’établit pas de corrélation entre réchauffement climatique et sècheresse : « il y a une faible confiance concernant la tendance observée à l’échelle mondiale de la sècheresse depuis le milieu du 20e siècle », dit-il. La question des bassines se résume probablement à une simple question de gestion efficace de l’accès à l’eau.