Emmanuel Macron en campagne vaccinale et électorale
Politique

Emmanuel Macron en campagne vaccinale et électorale

Par Philippe Oswald. Synthèse n°1429, Publiée le 10/11/2021
La neuvième allocution du président de la République en vingt mois, le 9 novembre, a marqué son entrée non officielle en campagne électorale. Troisième dose de vaccin conditionnant le passe sanitaire des seniors, pause sur la réforme des retraites, pression sur les chômeurs, retour en grâce du nucléaire, et… silence total sur l’identité de la France, l’immigration, la sécurité des Français, la dette publique… Dans ces 27 minutes émaillées d’autosatisfecit (« Nous avons réussi l’impensable » dans la « guerre » contre le Covid ; « Le pouvoir d'achat continue d'augmenter et la pauvreté recule »), le dit et le non-dit sont également significatifs.

Mais d’abord, un mot sur la forme : il n’y pas que les opposants politiques à s’inquiéter de cette neuvième intervention « jupitérienne », sans interlocuteur. Même Apolline de Malherbe sur BFMTV, le lendemain matin, s’est dite gênée par ce monologue impérieux. « La dernière fois qu'Emmanuel Macron a eu une vague contradiction, c'était McFly et Carlito. Ça pose un problème » a renchéri l’un des invités d’« Apolline matin ».

Les six premières minutes ont été consacrées à la énième vague de Covid. On y a appris qu’il n’était pas question d’un reconfinement ni d’un couvre-feu mais qu’il fallait plus que jamais se faire vacciner : « Vaccinez-vous ! Vaccinez-vous pour vous protéger ! » a exhorté le Président. « Être libre implique d'être responsable, solidaire ». Traduisons : être possesseur d'un passe sanitaire (qui devait initialement prendre fin le 15 novembre) implique d'être vacciné. Cette fois, ce sont les plus de soixante-cinq ans, et même les plus dociles d’entre eux, les doublement vaccinés, précisément dans l’espoir de rester libres, qui sont dans le collimateur : ils devront se soumettre à une troisième dose à partir de la mi-décembre pour conserver le fameux « pass sanitaire ». Aucune allusion à l’étrangeté d’un vaccin qui, en moins d’un an, a déjà besoin d’être injecté une troisième fois, à ses effets secondaires de plus en plus difficiles à dissimuler, ni aux restrictions ou à la disparition, précisément à cause d’effets indésirables, de ses trois concurrents initialement présentés eux aussi comme tout à fait sûrs… Aucun repentir sur l’assurance pourtant formelle que le Président lui-même avait donnée aux Français en avril dernier que jamais un passe sanitaire ne leur serait imposé. Aucune allusion non plus à la déclaration encore plus récente du ministre de la Santé qui certifiait en conférence de presse, le 26 août, que jamais les doubles vaccinés ne seraient privés de passe sanitaire s’ils ne recevaient pas cette troisième dose… Passons sur ces reniements pour en rester à cette discrimination par l’âge conditionnant le passe sanitaire. Cette rupture flagrante avec l’égalité entre les Français est-elle conforme à notre Constitution ? Qu’en dira le Conseil constitutionnel qui ne manquera pas d’être saisi ?

Les « contrôles renforcés » annoncés par Emmanuel Macron à propos du passe sanitaire concernent aussi les chômeurs. En annonçant la suspension des allocations-chômage pour qui refuserait de rechercher sérieusement un emploi, le chef de l’Etat semble avoir oublié que le code du travail prévoit déjà que l’allocation de chômage n’est due que si « des actes positifs et répétés en vue de retrouver un emploi, de créer, reprendre ou développer une entreprise » sont accomplis. Pas besoin de changer la loi : ici comme ailleurs, commençons par l’appliquer…

Sur le nucléaire, nouveau (et, espérons-le, bénéfique) revirement d’Emmanuel Macron qui a annoncé la construction de réacteurs nucléaires de type EPR alors qu’en 2018, en présentant sa feuille de route pour la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), il déclarait vouloir fermer 14 réacteurs nucléaires avant 2035.

Enfin, pour résumer, sur le fond : cette nouvelle intervention solitaire confirme que le Président conçoit l’exercice de son pouvoir comme une ingénierie sociale mesurée au cordeau sur le seuil d'acceptabilité, sans cesse élargi, des Français. La méthode : faire pression, à tour de rôle, sur une catégorie de la population ; « pousser le bouchon » puis lâcher du lest (pas de vaccination obligatoire des 5 à 11 ans à ce stade), éventuellement avec un coup de pouce du Conseil constitutionnel (maintien du secret médical à l’école), pour entretenir l’illusion d’un possible retour à la normale ; et progresser ainsi étape par étape, en niant la suivante (puisqu’il faudra vivre avec le coronavirus, les vaccinés d’aujourd’hui seront les non-vaccinés et privés de passe sanitaire de demain). Hygiénisme d’Etat, technocratie autoritaire, ingénierie sociale… comment définir cette nouvelle conception de la démocratie ?
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L'Obs
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