
Du « communautarisme » aux « séparatismes », attention, ça glisse !
Il faut donc tendre l’oreille quand apparaît un mot nouveau. Celui de cette rentrée est le mot « séparatisme », désormais préféré au « communautarisme ». Pour bien marquer la différence, le gouvernement l’emploie de préférence au pluriel : sus aux « séparatismes » ! Selon Le Parisien (13 septembre), c’est en effet une loi contre « les séparatismes » que le gouvernement concocte actuellement. Marlène Schiappa, ministre déléguée à la Citoyenneté, a annoncé sur Europe 1 (13 septembre) le lancement dès la semaine prochaine d'une vaste consultation sur ce thème auprès des représentants religieux, élus et « experts ». Mais il n’est pas sûr que leurs avis aient une grande importance : toujours selon Le Parisien, cette consultation est supposée durer jusqu’à la fin de l’année, alors que le projet de loi est « promis pour l’automne » et qu’Emmanuel Macron devrait en dévoiler les contours lors d’un voyage dans la région de Montpellier, et notamment à Lunel, foyer de djihadistes partis se battre en Irak et en Syrie, les 22 et 23 septembre…
Revenons au mot. La République serait-elle menacée par des « séparatistes » ? Les indépendantistes corses, basques ou bretons auraient-ils repris du poil de la bête à la faveur du confinement ? Mais non, mais non, s’agace le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin, « tout le monde sait bien que le problème principal de ce séparatisme, c'est l'islamisme radical ». Mais alors, pourquoi ne pas le dire ? Pourquoi préparer une loi contre « les séparatismes », sinon pour noyer le poisson sous prétexte de non-discrimination ? On répète souvent ces temps-ci la phrase d’Albert Camus : « Mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde. » Mais quand l’embrouillamini linguistique vient du sommet de l’État, c’est que des sophistes y préparent un coup tordu …
Comment en effet nommer autrement ce qui se profile derrière cette loi, si l’on en croit les informations du Parisien ? « De peur d'être accusé de stigmatiser une religion, Emmanuel Macron veut élargir à d'autres domaines. À l'Elysée, on cite les dérives de ces « établissements scolaires catholiques qui nient le pacte républicain ». Nous y voilà, la fausse fenêtre pour la symétrie est ouverte ! Cela saute aux yeux, les cathos menacent la République ! Quel serait donc leur crime « séparatiste » ? demande Gabrielle Cluzel sur Boulevard Voltaire (en lien ci-dessous) : « De ne pas enseigner l’Histoire façon Benjamin Stora ou l’éducation sexuelle comme au Planning familial ? » Si les cathos n’existaient plus (n’ont-ils pas rejoint dans l’esprit du président « les gens qui ne sont rien » ?), il faudrait les ressusciter : comme boucs émissaires, aujourd’hui comme sous l’Empire romain, on n’a jamais trouvé mieux !