Discipline à l’école : encore un bonnet d’âne pour la France !
Éducation

Discipline à l’école : encore un bonnet d’âne pour la France !

Par Philippe Oswald. Synthèse n°682, Publiée le 20/06/2019
L’enseignement en France accumule les mauvaises notes, notamment dans les fameuses enquêtes PISA ("Program for International Student Assessment") de l'OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques) : décrochage dans à peu près toutes les matières (littérature, langues, sciences, mathématiques, sans parler de l'illettrisme qui nous place à l'avant-dernier rang des pays de l'OCDE), inégalité des chances, insuffisante rémunération des professeurs… À présent, dans une enquête Talis publiée le 19 juin, c’est pour l’impuissance des enseignants à faire régner la discipline que l’OCDE attribue un bonnet d’âne à la France. L’enquête porte sur les pratiques professionnelles de 260.000 enseignants de collège dans une cinquantaine de pays. Elle confirme un rapport PISA de 2015 qui concluait déjà que les élèves français comptaient parmi les plus indisciplinés du monde.

En cause, le défaut ou l’absence pure et simple de formation pédagogique au maintien de la discipline pour près de la moitié des enseignants, mais aussi l’ensauvagement croissant des collégiens. Karine Tremblay, analyste éducation à l’OCDE, relève « une exception française » dans l’impréparation des enseignants à entrer dans l’arène : seulement 22% d’entre eux se disent « bien préparés » à ce qui les attend, un sur cinq n’y étant pas préparé du tout faute d’avoir reçu la moindre formation en ce sens… Et si formation il y a eu, celle-ci, héritée du pédagogisme des IUFM (instituts universitaires de formation des maîtres) devenus ESPE (écoles supérieures du professorat et de l'éducation), aura consisté à prôner la non-directivité, l’autorité étant tenue pour un gros mot hérité de « l’ancien monde ». Le tout aggravé par l’utopie égalitariste du « collège unique » qui condamne à enseigner à des profils d’élèves hétérogènes… dans des établissements où sont envoyés prioritairement les professeurs débutants : « En France, le premier poste d’un enseignant est souvent le plus dur qu’il aura à accomplir de toute sa carrière », constate Karine Tremblay. C’est ce que dénoncent nombre d’enseignants, notamment sur les réseaux sociaux avec le hashtag #pasdevagues apparu lors de la dernière rentrée : ils protestent contre la passivité de l’Education Nationale qui les abandonne à l’indiscipline et à la violence de certains élèves. Mais au bout du compte, les familles sont naturellement les premières responsables du déficit éducatif dont hérite l’école.

Résultat, toujours selon cette dernière enquête : en France, les professeurs consacrent en moyenne 17% de leur temps au maintien de l’ordre contre 13% dans les 48 pays de l’OCDE où elle a été menée. Soit trois jours de classe en moins sur l’année scolaire, avec des écarts de temps d’enseignement importants, qui mis bout à bout équivalent à 7,5 jours de classe par an, entre les collèges défavorisés et les autres. Dans les établissements regroupant plus de 30% d’écoliers socialement défavorisés, le temps passé à « faire la police » mange plus du quart d’une heure de cours. Encore s’agit-il de moyennes qui ne reflètent pas la réalité de ce qui se passe dans les collèges et lycées qui accueillent la plus grande « diversité », mais qu’ont désertés depuis longtemps les élèves dont les familles avaient les moyens de choisir. Que peut-on enseigner et que peut-on apprendre dans une classe où l’atmosphère oscille entre chahut, « incivilités » et « violences » ? Selon l'OCDE, les actes d'intimidation ou de harcèlement signalés dans les collèges français sont près du double de la moyenne des pays développés : 27%, au lieu de 14%. Ils ont augmenté de 5 points sur les cinq dernières années. L’avenir dira si la formation dispensée aux enseignants dans les futurs Instituts nationaux supérieurs du professorat (INSP) créés par la loi Blanquer (« Pour une école de la confiance ») à la place des Ecoles supérieures du professorat et de l’éducation (ESPE), qui s’étaient elles-mêmes substituées en 2013 aux IUFM…, permettra de remonter la pente.
La sélection
Discipline à l’école : encore un bonnet d’âne pour la France !
Discipline, formation, pratiques pédagogiques : les faiblesses des collèges français
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