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Débat présidentiel aux États-Unis, une courte victoire de Kamala Harris

Par Peter Bannister. Synthèse n°2270, Publiée le 17/09/2024 - Crédit photo : Saul Loeb / AFP
Le 10 septembre, 67 millions de téléspectateurs ont regardé le débat sur la chaîne ABC News entre Donald Trump et Kamala Harris. Selon la plupart des médias, la vice-présidente actuelle est sortie victorieuse du face-à-face. Mais quel sera l'impact réel de ce débat sur ces élections qui s'annoncent serrées ?

Comme souvent ces derniers mois, la dernière semaine politique a été longue aux États-Unis. Avant de subir une deuxième tentative d'assassinat, Donald Trump a été l'acteur d'un débat télévisé houleux. Sans surprise, les attaques ad hominem ont été au rendez-vous : Kamala Harris a qualifié Trump de « honte » pour les États-Unis, tandis que Trump a appelé Harris la « pire vice-présidente de l'histoire ».

Si Trump a remporté son duel contre Joe Biden en juin sans effort (surtout grâce aux problèmes cognitifs évidents du Président), de nombreux médias ont estimé qu'il avait perdu son débat sur ABC News face à Kamala Harris. 63 % des personnes interrogées par CNN estiment qu'Harris a gagné, un résultat semblable à celui obtenu par Newsweek. L'ancien président a reproché aux modérateurs d'ABC, Linsey Davis et David Muir, de manquer d'impartialité. Cependant, même si les fact-checkers ont semblé plus indulgents envers Harris qu'envers Trump, cela n'explique pas la perception globale du public. Comme on pouvait s'y attendre de la part d'une ancienne avocate, Harris n'a pas fait de gaffes majeures. Aux yeux des commentateurs, sans vraiment briller, son discours a été mieux construit et plus professionnel que celui de son adversaire. Trump a parfois mis de côté son propre programme pour répondre aux moqueries de la vice-présidente, comme lorsqu'elle a prétendu que ses militants partent avant la fin des meetings parce qu'ils s'ennuient. Le moment le plus spectaculaire du débat, qui a valu à Trump de nombreuses railleries, a été son insistance - sur la base d'informations très douteuses circulant sur internet - que des immigrés clandestins voleraient et mangeraient des chats à Springfield, dans l'Ohio. Paradoxalement, les sondages montrent que Trump devance Harris auprès des électeurs sur l'immigration et les questions économiques, mais beaucoup sont manifestement rebutés par ses contre-vérités flagrantes, son style souvent rancunier, ainsi que par de nombreux propos sans logique apparente, voire loufoques.

Divers sondages indiquent que la cote de Harris s'est généralement améliorée depuis le débat. Il ne s'agit pas d'une hausse massive, mais plutôt de la consolidation d'une tendance générale depuis qu'elle remplace Joe Biden dans la course à la Maison Blanche. Il faut pourtant souligner que la cote nationale de popularité ne révèle pas forcément qui sera le prochain président des États-Unis. Compte tenu d'un système électoral dans lequel le vainqueur dans un État ramasse toutes ses voix au sein du « collège électoral », on peut remporter le vote populaire national et néanmoins perdre l'élection présidentielle, comme cela s'est produit pour Al Gore en 2000 ou Hillary Clinton en 2016. Les élections se décideront très probablement dans une poignée de « swing states  » , dont l'allégeance politique est historiquement variable et où la course est très disputée. Définis par des victoires de moins de 3 % en 2020, ces États comprennent la Pennsylvanie, le Michigan, le Wisconsin, la Géorgie, l'Arizona et le Nevada, tous remportés par Biden en 2020, mais aussi la Caroline du Nord, remportée de justesse par Donald Trump. Lors du débat, Harris a montré son intention de cibler des groupes électoraux spécifiques, en s'adressant directement aux 800 000 habitants d'origine polonaise en Pennsylvanie, soit 5 % de la population, sur la question de l'Ukraine. À ce sujet, Harris a déclaré que sous une présidence Trump, Vladimir Poutine aurait déjà été à Kiev, les yeux rivés sur la Pologne. Ses propos ont été suivis par une campagne publicitaire démocrate attaquant l'attitude de Trump envers la Russie, s'adressant clairement aux électeurs d'origine est-européenne.

Pour l'instant, les données par État compilées par FiveThirtyEight ne montrent pas un impact significatif du débat du 10 septembre dans les « swing states », où la situation reste très serrée. Les derniers sondages suggèrent néanmoins que se focaliser exclusivement sur ces États pourrait être une erreur. FoxNews (très favorable à Trump) a par exemple noté une évolution surprenante dans l'Iowa, remporté confortablement par Trump en 2016 et en 2020. Au printemps 2024, un sondage Des Moines Register/Mediacom Iowa avait montré que Trump devançait Biden par 50 % contre 32 %, mais Mediacom montre actuellement que Kamala Harris serait à 43 % et Trump à 47 %.

Depuis que Joe Biden s'est retiré de la campagne présidentielle, il est clair que la dynamique actuelle est en faveur de Kamala Harris. Les prédictions selon lesquelles l'enthousiasme des démocrates après sa nomination serait de courte durée ne semblent pas se vérifier pour le moment. Pour beaucoup, Donald Trump semble désorienté, n'ayant plus l'argument facile de l'âge de Joe Biden, et manque d'une stratégie claire pour affronter sa nouvelle adversaire. Reste à voir s'il parviendra à en trouver une, ou si les résultats imprévisibles des États-clés lui permettront malgré tout de remporter l'élection.


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Débat Harris/Trump : qui a gagné le match ?
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