Le double langage de la France sur la GPA
Bioéthique

Le double langage de la France sur la GPA

Par Equipe LSDJ. Synthèse n°100, Publiée le 11/07/2017
Aude Mirkovic, maître de conférences en droit privé, commente dans un entretien au site Généthique les arrêts de la Cour de cassation du 5 juillet dernier. Selon elle, ces décisions conduisent, par les voies détournées de la jurisprudence, à la légalisation de la GPA (gestation pour autrui) en France. On bafoue ainsi les droits de l’enfant dont la filiation est « bricolée » pour assouvir les désirs d’adultes en mal de paternité ou de maternité, et l’on ferme les yeux sur l’esclavage auquel sont réduites les « mères porteuses ».

Aude Mirkovic distingue les deux sortes de cas soumis à la Cour de cassation :

  • Premier cas : celui de couples homme/femme qui ont obtenu un enfant d’une gestatrice (« mère porteuse ») à l’étranger. Désignés comme « parents » par l’acte de naissance, ils ont réclamé la transcription de l’acte de naissance sur les registres français d’état civil. « La Cour de cassation accepte la transcription de la filiation paternelle, car l’homme est le père biologique, mais refuse la transcription de la filiation maternelle car la femme française, par définition, n’a pas mis l’enfant au monde. Seule la mère porteuse peut être indiquée comme mère dans l’acte. Le problème est que la Cour juge le cas sans tenir compte de la GPA » ce qui revient à la cautionner.




  • Deuxième cas, « encore plus grave » : celui d’un couple d’hommes pour lequel « la Cour de cassation admet que le conjoint du père biologique puisse adopter l’enfant issu de la GPA. Elle accepte ainsi que des adultes privent délibérément l’enfant de mère pour le rendre adoptable » par le conjoint du père. Alors que l’adoption est destinée à réparer le malheur d’avoir perdu père, mère ou les deux, la GPA provoque ce malheur pour combler le désir d’enfant. « C’est donc un détournement, un dévoiement de l’adoption. La Cour de cassation accepte qu’on prive un enfant d’un de ses parents pour le rendre adoptable » accuse Aude Mirkovic.



Conclusion : « La France tient un double langage sur la GPA : on fait semblant de la condamner » (ce que fait théoriquement la loi) « mais, en réalité, on laisse faire. » Cette légalisation de fait de la GPA en France par la jurisprudence est une conséquence du « mariage pour tous » : comme deux hommes ou deux femmes ne peuvent pas procréer, « on fabrique des enfants sans père pour les couples de femmes, et sans mère pour les couples d’hommes ».

Pour défendre les droits de l’enfant, il ne suffit pas de s’appuyer sur la Convention internationale relative aux droits de l’enfant qui lui reconnaît le droit de connaitre, autant que possible, ses parents et d’être élevé par eux. « Il faudra aussi compléter la loi » pour que le recours à la GPA à l’étranger soit sanctionné. Ce faisant, on défendrait aussi les femmes réduites à cette forme d’esclavage qu’est la technique des « mères porteuses ».
La sélection
Le double langage de la France sur la GPA
Aude Mirkovic : « La France tient un double langage sur la GPA »
Gènétique 11/07/17
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