Politique

Logement social : si loin de l'ambition initiale !

Par Fabien Castel - Publié le 08/10/2024 - Photo by Frederic Scheiber Hans Lucas via AFP
Lors de sa création, le parc social français avait une vocation simple : donner une solution de logement temporaire à une famille en difficulté. Force est de constater que la situation est tout autre. Faible rotation, immobilisme sur des générations et emprise communautaire, voilà ce qu'est devenu le logement social en France.

La Fondation pour l'innovation politique (Fondapol) et l'Observatoire de l'immigration et de la démographie (OID) ont rendu en avril une note sur le sujet du logement social en France. Le Point a interrogé le principal auteur de l'étude, le préfet Michel Aubouin (ancien inspecteur général de l'administration et directeur de l'accueil et de l'intégration des étrangers), dans son numéro du 4 avril 2024.

Tout d'abord, la situation française est unique en Europe. La France compte à elle seule le quart des logements sociaux de l'Union Européenne avec plus de 5,3 millions de logements. Cela représente également un quart des logements en ville en France. Cela a un impact sur les dépenses publiques françaises : 34 milliards d'euros par an. En comparaison, le budget 2024 du ministère de l'Intérieur se situe autour de 26 milliards.

Le principal problème de ce système est son inefficacité chronique. Il avait été créé dans les années 1950 avec un objectif simple : donner une solution de logement temporaire, avec loyer modéré, aux personnes les plus modestes dans l'objectif d'un accès à la propriété privée (le fameux « parcours résidentiel »). Le logement social n'était donc qu'une solution transitoire pour une famille.

Mais aujourd'hui, le taux de rotation annuel est de 7 % : le système est complètement sclérosé. Les demandes de logement s'accumulent et les files d'attente s'allongent. Cette absence de renouvellement engendre « une rente de situation pour nombre de ses bénéficiaires qui, grâce au droit de maintien dans les lieux, y restent parfois sur plusieurs générations » explique Michel Aubouin. Il ajoute : « pour certains bénéficiaires, le logement social est devenu une rente de situation à vie, transmissible dans certains cas à leurs enfants et aux enfants de leurs enfants »

La surreprésentation des étrangers extra-européens dans le parc social est un fait. Seulement 11 % des Français non immigrés bénéficient d'un logement social, 35 % des immigrés y vivent. « 57 % des étrangers et descendants d'étrangers d'Afrique sahélienne résident en logement social, à l'image de la moitié des immigrés algériens et de leurs descendants » écrit le journaliste Charles Sapin. Cette proportion passe à 63 % pour la seconde génération. Cela engendre un système de concentration communautaire qui rend quasiment impossible toute intégration explique le rapport de la Fondapol.

Le système est injuste car bon nombre de locataires seraient en mesure de quitter le parc social. Le refus de s'ancrer en France et la volonté de rester en communauté expliquent cet immobilisme. Pire, certains logements sociaux deviennent par la force des choses une appropriation communautaire. La logique d'accession à la propriété privée n'existe plus, ce qui explique les difficultés d'intégration. En effet, « l'accession à la propriété privée est une forme d'intégration, vous êtes propriétaire d'un petit morceau de la France ». De plus, le fait d'être propriétaire vous pousse à prendre soin de votre environnement.

Le préfet conclut son rapport avec des préconisations : réaffirmer le caractère temporaire du social avec un bail à durée limitée, cesser la construction des logements sociaux (ce qui ferait une économie de 10 milliards d'euros par an), ne pas renouveler le bail des délinquants et des familles ayant une résidence secondaire, « considérer la nationalité du demandeur comme un élément de recevabilité du dossier » pour éviter les concentrations communautaires. Comme souvent, les constats sont là et les solutions existent. Mais pour les appliquer, il faut une volonté politique ferme.


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