International
Les dollars du Qatar : une arme de corruption massive
C’est le vénérable quotidien anglais « The Times » qui a fait cette révélation le mois dernier. Le Prince Charles, héritier du trône britannique, a accepté un don de 3 millions d’euros entre 2011 et 2015 de la part de l’ancien Premier Ministre qatari Hamad bin Jassim bin Jaber Al Thani (HBJ). Cet argent a été offert en trois versements d’1 million d’euros de la main à la main et sous la forme de billets de 500 euros. La banque privée Coutts a enregistré les dépôts sur les comptes du fonds humanitaire du Prince Charles (« The Prince of Wales’ Charitable Fund »). Un porte-parole de la famille royale a précisé que l’utilisation d’espèces avait été le choix du donneur, et que toutes les procédures d’audit avaient été suivies. Rien donc n’indique une manœuvre illégale mais ce don a choqué les sujets de Sa Gracieuse Majesté. Il a surtout levé le voile sur la stratégie de cet émirat dont la richesse est inversement proportionnelle à sa taille minuscule. HBJ personnifie cet activisme par le dollar. Il a accumulé une fortune de 1,2 milliard de dollars alors que des estimations venant de sources non officielles parlent de 50 milliards…
Véritable éminence grise de l’ancien Émir jusqu’à son abdication en faveur de son fils en juin 2013, HBJ pèse toujours sur la diplomatie qatarie. Mark Hollingsworth (voir son article en lien pour The Spectator) rappelle comment les Qataris ont infiltré le pouvoir britannique, jusqu’à la famille royale. La Reine elle-même avait accepté – exceptionnellement – une invitation à dîner à la résidence londonienne de l’Émir du Qatar pendant l’été 2014. Il faut dire que le gouvernement de Doha avait – entre autres largesses – offert de payer pour l’entretien du Château de Mey, propriété des Windsor. En tant que Président de Qatar Holdings, le fonds d’investissement qatari, la générosité d’HBJ s’est étendue aux entreprises d’armement. Il a aussi recruté Sir John Scarlett, l’ancien patron du MI6 (les services de renseignement) et l’ancien Premier Ministre Sir Tony Blair comme intermédiaires pour négocier l’acquisition de grands hôtels londoniens. Quand la crise financière de 2008 a plongé la Barclays Bank dans la tourmente, Qatar Holdings a injecté 6,1 milliards de livres pour la maintenir à flot. Il fut révélé, une fois la crise passée, que Barclays n’avait pas déclaré des commissions secrètes de 322 millions de livres versées au fonds d’investissement qatari… Sans conséquence pour la banque sauvée de la faillite, ni pour HBJ qui a regretté le manque de reconnaissance officielle.
Avec les États-Unis, HBJ a construit une alliance qui fait du Qatar un partenaire majeur à côté de l’ombrageux voisin saoudien. Le petit émirat abrite la plus grosse base aérienne américaine dans la région, ce qui lui offre une garantie de sécurité. Pourtant, le Qatar est soupçonné de financer le terrorisme islamiste, en particulier la branche syrienne d’Al-Qaeda, le « Front al-Nosra ». Une plainte a d’ailleurs été déposée devant la Haute Cour de Justice à Londres en juin 2021 : le bureau privé d’HBJ aurait été la plaque tournante pour faire parvenir des fonds clandestins à al-Nosra. HBJ lui-même a d’ailleurs révélé en mars dernier à la télévision qatarie que le Qatar s’était allié avec la Turquie, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et les États-Unis en investissant pas moins de 2 mille milliards de dollars dans le but de renverser Bachar El Assad (voir l’extrait ici de l’ Interview HBJ).
La France est une autre cible des attentions sonnantes et trébuchantes du petit émirat gazier. En février 2009, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la France a accordé des privilèges fiscaux aux investisseurs du clan Al Thani et des sociétés appartenant à l’État qatari. Notre pays est aussi devenu, pendant qu’HBJ était Premier Ministre, son premier fournisseur d’armes. La France n’a pas de Prince Charles, mais elle a Bernard-Henri Lévy. Ce dernier vient de perdre en appel son procès contre le média Blast qui l’accusait d’avoir reçu en 2011 près de 9,1 millions d’euros du gouvernement qatari en contrepartie de son appui dans le déclenchement de la guerre en Libye.
Dans quelques mois, le Qatar va accueillir la Coupe du Monde de football. C’est une consécration pour HBJ qui, s’il n’est plus aux manettes du pouvoir à Doha, était sur le devant de la scène pour soutenir la candidature de son pays. Les dernières révélations sur l’argent accepté par le Prince Charles, le rejet en appel de la plainte de BHL, devraient inviter les dirigeants occidentaux à la plus grande prudence face aux coffres ouverts de Doha. Mais la guerre en Ukraine rend le gaz et le pétrole qataris encore plus précieux pour les pays de l’OTAN. Voilà de quoi nourrir la générosité envahissante du petit émirat qui cherche à influencer la marche du monde.
Véritable éminence grise de l’ancien Émir jusqu’à son abdication en faveur de son fils en juin 2013, HBJ pèse toujours sur la diplomatie qatarie. Mark Hollingsworth (voir son article en lien pour The Spectator) rappelle comment les Qataris ont infiltré le pouvoir britannique, jusqu’à la famille royale. La Reine elle-même avait accepté – exceptionnellement – une invitation à dîner à la résidence londonienne de l’Émir du Qatar pendant l’été 2014. Il faut dire que le gouvernement de Doha avait – entre autres largesses – offert de payer pour l’entretien du Château de Mey, propriété des Windsor. En tant que Président de Qatar Holdings, le fonds d’investissement qatari, la générosité d’HBJ s’est étendue aux entreprises d’armement. Il a aussi recruté Sir John Scarlett, l’ancien patron du MI6 (les services de renseignement) et l’ancien Premier Ministre Sir Tony Blair comme intermédiaires pour négocier l’acquisition de grands hôtels londoniens. Quand la crise financière de 2008 a plongé la Barclays Bank dans la tourmente, Qatar Holdings a injecté 6,1 milliards de livres pour la maintenir à flot. Il fut révélé, une fois la crise passée, que Barclays n’avait pas déclaré des commissions secrètes de 322 millions de livres versées au fonds d’investissement qatari… Sans conséquence pour la banque sauvée de la faillite, ni pour HBJ qui a regretté le manque de reconnaissance officielle.
Avec les États-Unis, HBJ a construit une alliance qui fait du Qatar un partenaire majeur à côté de l’ombrageux voisin saoudien. Le petit émirat abrite la plus grosse base aérienne américaine dans la région, ce qui lui offre une garantie de sécurité. Pourtant, le Qatar est soupçonné de financer le terrorisme islamiste, en particulier la branche syrienne d’Al-Qaeda, le « Front al-Nosra ». Une plainte a d’ailleurs été déposée devant la Haute Cour de Justice à Londres en juin 2021 : le bureau privé d’HBJ aurait été la plaque tournante pour faire parvenir des fonds clandestins à al-Nosra. HBJ lui-même a d’ailleurs révélé en mars dernier à la télévision qatarie que le Qatar s’était allié avec la Turquie, l’Arabie Saoudite, la Jordanie et les États-Unis en investissant pas moins de 2 mille milliards de dollars dans le but de renverser Bachar El Assad (voir l’extrait ici de l’ Interview HBJ).
La France est une autre cible des attentions sonnantes et trébuchantes du petit émirat gazier. En février 2009, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la France a accordé des privilèges fiscaux aux investisseurs du clan Al Thani et des sociétés appartenant à l’État qatari. Notre pays est aussi devenu, pendant qu’HBJ était Premier Ministre, son premier fournisseur d’armes. La France n’a pas de Prince Charles, mais elle a Bernard-Henri Lévy. Ce dernier vient de perdre en appel son procès contre le média Blast qui l’accusait d’avoir reçu en 2011 près de 9,1 millions d’euros du gouvernement qatari en contrepartie de son appui dans le déclenchement de la guerre en Libye.
Dans quelques mois, le Qatar va accueillir la Coupe du Monde de football. C’est une consécration pour HBJ qui, s’il n’est plus aux manettes du pouvoir à Doha, était sur le devant de la scène pour soutenir la candidature de son pays. Les dernières révélations sur l’argent accepté par le Prince Charles, le rejet en appel de la plainte de BHL, devraient inviter les dirigeants occidentaux à la plus grande prudence face aux coffres ouverts de Doha. Mais la guerre en Ukraine rend le gaz et le pétrole qataris encore plus précieux pour les pays de l’OTAN. Voilà de quoi nourrir la générosité envahissante du petit émirat qui cherche à influencer la marche du monde.