Société

George Soros, financier de génie et idéologue influent

Par Stanislas Gabaret. Synthèse n°2299, Publiée le 21/10/2024 - George Soros au Forum économique mondial de Davos, Suisse, le 23 janvier 2020. AFP / FABRICE COFFRINI
Héraut autoproclamé d'une « société ouverte » contre une « société fermée », « accro à la philanthropie politique », George Soros est avant tout un trader de génie qui a construit un empire avant d'imposer son idéologie. Ayant travaillé à l'ouverture du système soviétique, il est maintenant le chantre du progressisme sous toutes ses formes. Qui est vraiment ce milliardaire de 94 ans qui a déjà donné 32 milliards de $ à l'Open Society Foundations pour défendre ses idées avant d'en céder aujourd'hui les rênes à son fils ?

Né György Schwartz en 1930, en Hongrie, George Soros reçut de son père, célèbre avocat de Budapest, une éducation juive laïque et un sens précoce de l'internationalisme. Emprunté pour échapper à l'Holocauste pendant la Seconde Guerre mondiale, le patronyme « Soros » signifie « monter en flèche » en espéranto. Après la guerre, le jeune homme intègre la London School of Economics (et travaille dans une boîte de nuit pour financer ses études). C'est là qu'il rencontre le célèbre philosophe Karl Popper, à qui il empruntera le concept de « société ouverte » pour fonder en 1979 son réseau d'ONG, l'Open Society Foundations (OSF), désormais présent dans 120 pays. Il rappelait sa vocation originelle au Forum de Davos, le 24 janvier 2019 : « Mes premiers efforts visaient à saper le système d'apartheid en Afrique du Sud. Ensuite, j'ai tourné mon attention vers l'ouverture du système soviétique. J'ai créé une collaboration avec l'Académie des sciences de Hongrie, qui était sous contrôle communiste. […] Cet arrangement a réussi au-delà de mes rêves les plus fous. […] C'était en 1984. »

En septembre 1992, à la suite d'une spéculation osée sur la dévaluation de la livre sterling, George Soros devient « l'homme qui a fait sauter la Banque d'Angleterre ». Après avoir vendu massivement la devise pour la racheter moins cher, il empoche 1,1 milliard de dollars en 24 heures. C'est à la même époque qu'il s'attaque à la lire italienne, puis au franc français. Interrogé par LSDJ, un économiste ayant travaillé avec lui décrit Soros comme « le plus grand trader de l'histoire ». Sa fortune est aujourd'hui estimée à 7,2 milliards de dollars par la revue Forbes, après avoir fait don de plus de 32 milliards à l'OSF, selon l'organisation elle-même, ce qui est colossal. Qui a déjà dépensé autant pour défendre ses idées ?

Auteur d'un livre intitulé Soros et la société ouverte (Culture & Racines, 2018), Pierre-Antoine Plaquevent n'hésite pas à décrire l'Open Society comme un outil d'influence et d'ingérence global. Immigrationniste assumé et « père millionnaire de la dépénalisation des drogues », George Soros veut aussi libéraliser la prostitution et l'avortement. L'OSF finance par ailleurs des mouvements hostiles à l'État d'Israël (dont certaines ONG favorables au terrorisme) et des lobbies (LGBT, Black Lives Matter) ; s'appuie sur un réseau de députés « fiables » au Parlement européen et maintient des liens avec le Syndicat de la magistrature en France. Le but est d'imposer un nouvel ordre mondial (ce sont ses propres mots), au-dessus des États, quitte à déstabiliser des régimes politiques : « Notre tâche ne peut pas être laissée aux gouvernements » (24/01/2019).

Au sein de sa vision du monde, la promotion de l'immigration de masse est essentielle. Lors de la crise de 2015, Soros exigeait à l'UE, depuis New York, d'accueillir 1 million de migrants chaque année, en le finançant grâce à la dette (26/09/2015). « Il s'agirait pour l'UE d'apporter 15 000 € par demandeur d'asile. [...] L'UE pourrait lever ces fonds, en émettant des obligations à long terme via sa capacité d'emprunt AAA largement inexploitée. » Plaquevent nous apprend que l'Open Society a alloué plus de 500 millions de dollars afin de favoriser l'accueil des migrants en 2017. La même année, et bien qu'il ait augmenté depuis, le budget de Frontex (l'agence qui surveille les frontières européennes) était de 300 millions d'euros. Pour Gaëtan Cliquennois, chercheur au CNRS, cette promotion des droits des minorités et des migrants serait le moyen d'imposer un « capitalisme sans frontières, qui se caractérise par la liberté de circulation des biens et des personnes ». Les valeurs conservatrices, le nationalisme et les religions font obstacle à cette logique néolibérale et sont donc à combattre.

Soutien permanent des campagnes démocrates aux États-Unis, le milliardaire investit abondamment dans la sphère médiatique. Début 2024, il est devenu actionnaire principal de Audacy, deuxième groupe de radiodiffusion comptant 170 millions d'auditeurs chaque mois. Avant Audacy, il injectait plus de 80 millions de dollars dans le réseau Latino Media Networks, qui regroupe dix-huit radios hispanophones. Il a également investi au fil des années dans plusieurs titres européens comme en France (subventions au média d'extrême gauche StreetPress) ou en Pologne, en finançant la presse depuis 2016 et en entrant en 2023 au capital du Wirtualna Polska Holding (« Pologne virtuelle »), qui gère le site Internet le plus visité du pays. La réélection du candidat pro-avortement Donald Tusk n'y est pas étrangère. Dans plusieurs cas, comme celui de StreetPress ou du fonds de dotation Assa Traoré, les soutiens financiers de l'OSF sont assumés de façon transparente.

Présent en Ukraine avec l'OSF depuis 1990, le natif de Budapest s'est aussi activement investi dans la guerre contre la Russie. Il déclarait lors d'une récente conférence à Munich sur la sécurité (16/02/2023) : « Une victoire ukrainienne entraînerait l'éclatement de l'empire russe. La Russie ne représenterait plus une menace pour l'Europe et pour le monde. [...] Cela constituerait un immense soulagement pour les sociétés ouvertes et causerait d'énormes problèmes aux sociétés fermées. » Alors que, selon la presse hongroise, il avait déjà financé le coup d'État de 2014, les chiffres de l'OSF rapportent des dons de 230 millions à l'Ukraine depuis son installation dans le pays, sans compter le lobbying auprès de l'UE pour qu'elle apporte une aide impressionnante à l'effort de guerre ukrainien. Et même si une défaite russe n'est plus vraiment réaliste, la réduction d'activités en Europe annoncée par l'OSF en 2023 laisse percevoir le sentiment du devoir accompli quant au déplacement définitif du centre de gravité de celle-ci vers l'Ouest.

Le droit est également un outil d'ingérence privilégié. Dans un rapport très documenté, le think tank ECLJ (European Center for Law and Justice) avait mis en lumière l'affaire dite des « juges Soros ». Entre 2009 et 2019, 22 des 100 juges permanents de la Cour européenne des droits de l'homme étaient issus de l'OSF et de six autres ONG financées en partie par George Soros. Ils ont jugé plus d'une centaine d'affaires introduites par leur propre ONG à la CEDH. Alors que la jurisprudence de la Cour fait autorité au sein des États membres, l'Open Society s'appuie sur le « contentieux stratégique » (recours judiciaires afin d'imposer de nouvelles normes politiques). Grégor Puppinck, docteur en droit et directeur de l'ECLJ, affirme que sa publication a convaincu la CEDH de modifier son règlement intérieur et de renforcer ses règles éthiques ; mais des problèmes demeurent, notamment l'opacité du greffe de la Cour.

Âgé de 94 ans, George Soros a choisi en 2023 de léguer la gestion de son empire à son fils Alexander, fervent démocrate et opposant radical à Donald Trump. « Nous pensons pareil  », affirme le père. Le fils, lui, veut s'investir encore plus en politique. L'influence de l'Open Society sur les affaires du monde semble avoir encore de beaux jours devant elle.

La sélection
Avant la présidentielle, le milliardaire George Soros bouscule le paysage radiophonique aux États-Unis
Lire l'article sur Le Figaro
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La sélection des commentaires
François
Le 21/10/2024 à 13:53
Un article très instructif, comme toujours.
2 commentaires
Le 21/10/2024 à 08:22
Bonjour, comment pouvons nous vous prendre au sérieux lorsque l’on trouve une énorme faute de français dans le premier mot de votre article.
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