Fin de vie : « l'aide à mourir » de nouveau au programme de l'Assemblée
Cette idée de Michel Barnier – « gagner du temps » tout en consultant « peut-être » les soignants –, n'a pas été du goût de ceux-ci. Certains, favorables à l'euthanasie, tels François Blot, spécialiste en réanimation, Sylvain Bouquet, médecin généraliste, et Valérie Mesnage, neurologue, estiment dans une tribune à Marianne (14 octobre) que « jouer encore la montre serait une nouvelle offense démocratique ». En revanche, les membres de la Société française d'accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), qui compte plus de 10 000 soignants et regroupe, via le collectif Soins de vie, 24 organismes, sociétés et syndicats du monde médical et socio-médical, s'opposent à la reprise du processus législatif. Ils ont réagi à cette annonce dans une lettre ouverte au Premier ministre (30 septembre) : « Alors que vous avez nommé un ministre de la Santé et de l'accès aux soins, il nous semblerait extrêmement inapproprié de nous demander d'aider à mourir nos concitoyens [...] avant même tout autre projet visant à mieux répondre aux besoins de santé des Français. » Selon un rapport de la Cour des comptes (juillet 2023), les besoins en soins palliatifs en France « ne seraient couverts qu'à hauteur de 50 % ».
La présidente de la Sfap, Claire Fourcade, a expliqué au JDD (23 octobre) pourquoi « le projet fin de vie inquiète les soignants ». Le flou qui entourait encore ce texte trois semaines après la déclaration de politique générale de Michel Barnier, la non-reprise du dialogue avec les soignants, puis l'indication donnée à France 2 qu'il fallait « reprendre le travail au moment où il a été interrompu, pour gagner du temps » a fait retomber les soignants « dans cette inquiétude permanente qui pèse lourd pour nous », explique-t-elle. « Sur quoi portera donc le dialogue ? Et avec qui sera-t-il engagé ? » s'interroge-t-elle. Dans l'état où il avait été laissé par l'Assemblée nationale, poursuit Claire Fourcade, « le texte était devenu très coercitif pour les soignants : création d'un délit d'entrave, absence de clause de conscience pour les pharmaciens, nécessité de la présence d'un soignant du début à la fin, y compris dans le cadre d'un suicide assisté […]. Reprendre le texte d'Olivier Falorni, qui inquiète de nombreux soignants, n'est pas un signe d'ouverture et d'écoute. » Et Claire Fourcade de rappeler : « Soigner tous nos patients dans de bonnes conditions : voilà notre priorité ». Avant de conclure : « Nous restons mobilisés pour redire notre certitude : donner la mort ne peut et ne sera jamais un soin. »
Outre l'absence d'unités de soins palliatifs dans une vingtaine de départements, la loi actuelle est « mal connue et inégalement appliquée sur le territoire français », constate Alliance Vita. Une confusion entoure en particulier la sédation (endormissement du patient) que la loi Claeys-Leonetti autorise sous deux formes : la « sédation proportionnée » qui est « transitoire, intermittente, réversible », et la « sédation profonde et continue jusqu'au décès ». Celle-ci est réservée aux personnes dont le pronostic vital est engagé à court terme et dont la souffrance est réfractaire aux traitements. Mais dans un cas comme dans l'autre, la sédation a pour but de soulager la souffrance d'un patient en « phase avancée ou terminale », et non de lui donner la mort, même si la sédation, qui n'est pas un produit létal, accélère le décès. Il en va tout autrement dans l'euthanasie où la mort est provoquée directement par un produit létal.