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Davos, ce forum des élites bousculé par Trump et Milei

Par Max George. Synthèse n°2386, Publiée le 30/01/2025 - Photo : Le discours à distance de Donald Trump au Forum économique mondial de Davos (Suisse), le 23 janvier 2025 . Crédits : Fabrice Coffrini / AFP
Le forum économique mondial de Davos a connu une semaine pour le moins inhabituelle avec l'absence de la plupart des chefs d'État du G7, et surtout, la remise en cause de ses principes fondateurs par le président américain, Donald J. Trump et son allié argentin, Javier Milei.

L'édition 2025 du World Economic Forum de Davos (WEF), dans les Alpes suisses, n'était pas comme les autres. Les thèmes traditionnels du forum, comme la protection de l'environnement, l'inclusion, ou l'aide aux pays en voie de développement, n'étaient plus les priorités. Un seul discours, celui de Donald J. Trump, était attendu et sans surprises, son ton comme ses idées ont tranché avec l'atmosphère d'habitude si lisse et consensuelle du sommet, en particulier sur l'immigration, l'environnement et les politiques d'inclusivité. « J'ai interrompu le Green New Deal », s'est vanté Donald Trump, qu'il a qualifié de « ridicule et inutile » et de « nouvelle arnaque verte ». Pas moins de six rapports sur le réchauffement climatique et la transition énergétique ont été publiés sur le site du WEF en janvier. Mais à la place, Donald Trump a annoncé « une urgence nationale énergétique pour débloquer l'or liquide qui se trouve sous nos pieds […] Les États-Unis ont les plus grandes quantités de pétrole et de gaz sur la planète et nous allons les exploiter. » Le temps où John Kerry représentait Joe Biden comme envoyé spécial des États-Unis pour le climat, à Davos, paraissait bien lointain. Par politesse, le public a applaudi Donald Trump, comme il a applaudi John Kerry un an auparavant, lorsqu'il défendait des politiques opposées. Enfin, dans la lignée de sa « revolution of common sense », ou révolution du bon sens, Trump a demandé au patron de Bank of America, présent sur l'estrade, d'ouvrir sa banque aux « conservateurs, parce que beaucoup de conservateurs se plaignent que les banques ne leur permettent pas de faire des affaires avec les banques, y compris Bank of America ».

Donald Trump a trouvé un grand allié à ce forum : le président argentin, Javier Milei, libertarien convaincu, qui s'est rendu en personne au forum, sans doute pour convaincre les chefs d'entreprise de réinvestir en Argentine. Dans son discours, Milei a opéré une longue diatribe contre le système économique et de gouvernance hérité depuis des années 1950 : « en promouvant un agenda socialiste, tout en opérant insidieusement au sein du paradigme libéral, cette nouvelle classe politique a dévoyé les valeurs du libéralisme et a ainsi remplacé la liberté par la libération, en utilisant le pouvoir coercitif de l'État pour redistribuer la richesse créée par le capitalisme. » Ces propos offensifs du président argentin sont une critique envers ses prédécesseurs, qui ont instauré un État providence fort et une politique monétaire inflationniste pendant plus d'un demi-siècle, provoquant six faillites du pays entre 1951 et 2020. À son arrivée au pouvoir en décembre 2023, Javier Milei a hérité d'une inflation de 211,4 %, divisée par deux en un an grâce à des coupes budgétaires massives. Javier Milei s'en est pris aussi au wokisme comme moyen de « justifier l'expansion de l'État à travers l'appropriation et la perversion de causes nobles. » Parmi celles-ci, Javier Milei a souligné le féminisme, les droits LGBT, l'environnementalisme, l'avortement et le malthusianisme, autant de politiques activement soutenues par plusieurs des firmes internationales qui sponsorisent ce forum. En 2015, pour la première fois, la question LGBT a figuré sur l'agenda officiel de Davos, avec des conférences organisées par le cabinet d'avocats Ernst & Young et Microsoft.

Depuis vingt ans au moins, Davos est critiqué pour être un lieu réservé à une clique d'hyper-riches globalisée et déconnectée. En 2004, Samuel Huntington, inventait l'expression « Davos Man » pour décrire le profil type du participant de Davos : un membre des élites globalisées « qui ont un faible besoin de loyauté nationale, qui considèrent les frontières nationales comme des obstacles qui heureusement disparaissent et voient les gouvernements nationaux comme des résidus du passé, dont la seule fonction est de faciliter les opérations des élites globalisées ». En 2019, l'ancienne Première ministre britannique, Theresa May, se moquait des participants de Davos souvent comparés à des « Citizens of the World » (citoyens du monde), qu'elle a préféré qualifier de « Citizens of Nowhere », (citoyens de nulle part). Les tarifs d'entrée au forum reflètent bien l'état d'esprit du sommet décrié par Theresa May. Pour 'être admis par exemple dans la tente des chefs d'entreprise pendant le forum, le participant doit verser la somme astronomique de 601 000 €. D'ailleurs, selon le Financial Times, le tarif standard, de 100 € seulement en 2024, a été multiplié par dix cette année, passant ainsi à 1000 € pour un participant lambda. Détail plus sordide : ce forum est aussi une aubaine pour le tourisme sexuel. Selon une enquête du Daily Mail, au moins 300 prostitués femmes ou trans ont réservé des hôtels à Davos et les alentours pendant la semaine du forum, un chiffre deux fois plus élevé qu'en 2024.

Signe que le prestige de Davos décline, bon nombre de chefs d'État ne considèrent pas leur présence au sommet indispensable : Joe Biden ne s'y est jamais rendu et hormis Donald Trump, les autres absents de Davos 2025 étaient le président chinois, Xi Jinping, le Premier ministre indien, Narendra Modi, le Premier ministre britannique, Sir Keir Starmer, qui a envoyé sa chancelière de l'Échiquier, Rachel Reeves et Emmanuel Macron.
 

La sélection
Le Davos que j'ai connu n'existe plus
Lire l'article sur le site du Spectator
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1 commentaire
Christophe
Le 30/01/2025 à 23:19
Il faut lire le discours de Javier Milei. Quel cran d’aller annoncer ainsi au WEF que sa fin est proche !
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