Culture

P. Diddy : l'affaire Epstein de l'industrie musicale

Par Maximilien Kopriwa - Publié le 18/10/2024 - Photo : P. Diddy devant son étoile à Hollywood (Joe Seer / Shutterstock)
Après le monde politico-financier et l'affaire Epstein, le monde du cinéma et l'affaire Weinstein, c'est au tour de l'industrie musicale d'être prise dans la tourmente d'un scandale sexuel de grande ampleur.

Le 16 septembre, P. Diddy (autrefois appelé Puff Daddy, de son vrai nom Sean Combs), rappeur et producteur milliardaire, est incarcéré pour trafic sexuel, extorsion et coercition en vue de prostitution. Si la nouvelle a provoqué une telle onde de choc, c'est parce que les faits se seraient étalés sur trois décennies et que P. Diddy était connu du tout Hollywood pour ses fêtes auxquelles participaient des célébrités mondiales. La toile s'enflamme.
P. Diddy serait-il le bouc émissaire du show-business ?

Il y a un an, le « bad boy du divertissement » recevait les clés de la ville de
New York des mains du
« bad boy de la politique », dixit le maire de NYC lui-même. Aujourd'hui, il croupit dans une prison ultra-sécurisée de Brooklyn, de crainte qu'il ne finisse suicidé comme Jeffrey Epstein. À 54 ans, P. Diddy régnait sur un empire, en légende vivante du hip-hop. Son label, Bad Boy Records, fondé en 1993, a lancé nombre de rappeurs à succès comme Notorious B.I.G. En 1997, il obtient un Grammy Award. Au sommet, il investit : marques de vêtements, spiritueux, chaîne de télévision… Rien n'était trop gros pour Diddy. Milliardaire, il semblait intouchable.

À lire l'acte d'accusation, l'enfer n'est pas loin. La star est inculpée pour trafic sexuel, enlèvement, travail forcé, obstruction de la justice et crime en bande organisée. Le juge a rejeté sa demande de libération conditionnelle, malgré la proposition d'une caution de 50 millions de dollars. En novembre 2023, son ex-femme, « Cassie » Ventura dépose plainte. Elle l'accuse d'avoir eu pendant une décennie des comportements violents et déviants. Un accord à l'amiable est passé. Trop tard, le feu prend. Neuf plaintes sont déposées. En février, tout s'accélère. Le producteur Lil Rod accuse P. Diddy de l'avoir drogué et sexuellement agressé alors qu'ils travaillaient sur son dernier album. Le mois suivant, CNN dévoile une vidéo de 2016 dans laquelle le rappeur bat sa femme. Dans la foulée, le FBI lance d'impressionnantes perquisitions sur ses propriétés. On y trouve des armes, de la drogue (ecstasy, kétamine et GHB, la « drogue du violeur »), plus de 700 sextoys, un millier de bouteilles d'huile de bébé servant de lubrifiant et surtout… des milliers d'enregistrements d'orgies organisées par le rappeur.

Tout le « monde » connaissait, depuis les années 1990, ses soirées très sulfureuses. Grâce aux témoignages et aux vidéos, la police a révélé que le rappeur avait organisé, durant trente ans, des freak offs, c'est-à-dire des orgies pouvant s'étaler sur plusieurs jours, dans lesquels les participants étaient drogués (soumis chimiquement) et des travailleurs du sexe, hommes et femmes, conviés. P. Diddy est dépeint comme le coordinateur. D'après le procureur de New York, « il considérait ces rencontres forcées comme des projets artistiques personnels ». Selon le New York Times, il s'agissait de « spectacles sexuels forcés, laissant les participants si épuisés qu'il fallait leur administrer des liquides par voie intraveineuse pour qu'ils se rétablissent ».
En cas de résistance à ses désirs, Sean Combs utilisait la violence et la menace d'une arme. Il avait l'habitude de faire chanter ses victimes à l'aide de vidéos compromettantes ou de drogue, en les menaçant de leur retirer son soutien financier ou en leur promettant une carrière dans le show-business.

Si l'affaire est aussi explosive, c'est que P. Diddy ne peut avoir agi seul aussi longtemps sans l'appui de complicités actives et passives. « Combs n'a pas fait ça tout seul. Comme je le mentionne, il a été accusé de complot. Il a utilisé ses affaires, ses employés et d'autres associés proches pour arriver à ses fins »,
a ajouté le procureur. Quelques jours après l'arrestation, 120 personnes, hommes et femmes, se sont déclarées victimes, dont 25 qui étaient mineures au moment des faits. La plus jeune avait neuf ans. Leur avocat, Tony Buzbee, a ouvert une plateforme téléphonique qui, d'ores et déjà, a reçu plus de 3 285 appels. À l'écouter, de nombreuses célébrités risqueraient très gros : « Le jour viendra où nous donnerons des noms autres que celui de Sean Combs. Et il y a beaucoup de noms. »

Depuis, Internet est en ébullition. Les internautes rivalisent d'ingéniosité pour tenter de déterminer les célébrités impliquées. On parle de Jay-Z, Beyoncé, Will Smith, Di Caprio… Pour l'heure, rien n'est prouvé. La suppression de tweets par plusieurs célébrités en lien avec le rappeur alimentent les rumeurs, mais également les paroles d'une chanson d'Eminem à peine cryptées. Le passé de Diddy est scruté à la loupe, notamment ses relations avec Usher et Justin Bieber alors qu'ils étaient adolescents.

Le scandale ne fait que commencer. Déjà, il s'immisce dans les élections américaines. Quoi qu'il en soit, il rappelle que le monde du divertissement est mal placé pour donner des leçons (consigne de vote, antiracisme...). Il interroge aussi sur les valeurs véhiculées par le gansta rap pour lequel P. Diddy a tant fait.

La sélection
Affaire P. Diddy : ce que l'on sait des soirées "Freak Offs" au coeur des accusations de trafic sexuel qui visent le rappeur
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